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Rixes : les violences entre bandes au Royaume-Uni, en Suède et en Afrique du Sud

Dans le club des correspondants, franceinfo passe les frontières pour voir ce qui se fait ou se passe ailleurs dans le monde. Direction Londres, Stockholm et Le Cap, pour voir l'ampleur des violences entre groupes rivaux.

Article rédigé par franceinfo - Richard Place, Frédéric Faux, Romain Chanson
Radio France
Publié
Temps de lecture : 6min
Des membres de la police dans la périphérie de Cap Town, en Afrique du Sud (illustration). (RODGER BOSCH / AFP)

Les phénomènes de règlements de comptes entre groupes de jeunes fait débat en France. Des rixes ont fait plusieurs victimes ces dernières semaines, obligeant le gouvernement français à s'emparer du sujet. Ce problème existe aussi dans d'autres pays.

Au Royaume-Uni, des attaques au couteau très courantes

La violence des jeunes fait également débat outre-Manche. Les Britanniques ont bien du mal à endiguer ce phénomène. Ce sont les attaques au couteau qui se multiplient ces dernières années. Il suffit malheureusement de feuilleter les pages des journaux, tous les jours : un homme de 19 ans tué et un blessé grave âgé de 18 ans, c’était avant-hier au nord de Londres. Dans le même quartier, il y a deux semaines, un autre meurtre, la victime avait 21 ans, poignardée elle aussi.
Pas forcément des règlements de comptes, mais des bagarres entre jeunes, les victimes et les agresseurs ont le même âge. Les mots d’abord, le couteau ensuite.
Un phénomène qui s’est aggravé l’année dernière : une année de confinement, sans école et avec plus de chômage encore. Ce type de violence prolifère, en particulier dans la capitale.

La classe politique se déchire autour de ce sujet, sans parvenir à trouver une solution. C'est un clivage classique : à gauche, on accuse le gouvernement de ne pas lutter suffisamment contre l’austérité et l’exclusion. Des jeunes livrés à eux-mêmes, sans cadre ni accompagnement, voilà ce qui engendre ces agressions, selon le Labour. À droite, on vise le maire travailliste de Londres, jugé trop laxiste dans sa politique de sécurité.

Depuis mardi justement, le Parlement étudie un projet de loi dans lequel il est question de durcir les peines contre les mineurs. Il y a deux ans, les professeurs et les professionnels de santé avaient été sollicités pour signaler les élèves violents. Aucun effet à ce stade. Il faut dire que, depuis un an, les établissements scolaires sont restés fermés la majeure partie du temps et les soignants menaient un autre combat.

En Suède, une fusillade par jour

C'est un pays auquel on ne pense pas particulièrement quand on parle de règlements de comptes. Le royaume nordique a plutôt une image pacifique, mais ici aussi, la guerre des gangs fait régulièrement la une des médias. C’est vrai que le taux d'homicides en Suède reste l’un des plus faibles au monde, c'est un fait. Mais lorsqu’on zoome sur la criminalité organisée, c’est un tout autre paysage qui apparaît.

En 2020, 366 fusillades ont été décomptées en Suède, soit une par jour, qui ont fait un total de 47 morts. C’est une hausse de 20% sur deux ans. Ces fusillades ont souvent lieu dans les banlieues des grandes villes et elles sont généralement motivées par une rivalité entre gangs, liée au trafic de drogue, ou au trafic d’armes. Avec une particularité par rapport à ce qui se passe ailleurs en Europe : l’usage d’explosifs et de grenades. Un mode opératoire dont l’apparition est liée au flux migratoire venu d’ex-Yougoslavie, zone de conflit dans les années 90.

Le phénomène touche toutes les grandes villes, même si pendant longtemps, le symbole de cette violence a été Malmö, dans le sud du pays. Dans cette ville, les autorités locales se sont inspirées d’une méthode venue des États-Unis et qui consiste à réunir des membres de gangs, à les confronter à divers représentants de la société civile, à leur offrir des alternatives, pour les persuader de changer de vie. Les fusillades ont diminué pour la quatrième année consécutive.

Mais la région qui prend le relais, c’est celle de Stockholm, avec une augmentation de 80% en 2020 et des faits-divers qui effraient l’opinion publique, comme cette balle perdue qui a tué l’été dernier une fillette de 12 ans. Pour faire face à ce problème, le gouvernement s’est aussi résolu à augmenter l’effectif de policiers : avec 21 000 agents de terrain, pour 10 millions d’habitants, ils n’ont jamais été aussi nombreux en Suède.

En Afrique du Sud, les très jeunes en première ligne

Dans ce pays, la violence des jeunes s'incarne dans les gangs. En particulier dans les townships de la ville du Cap. C'est souvent à l'adolescence et après un décrochage scolaire que la criminalité absorbe ces jeunes. C'est vers 12/13 ans que peut commencer le banditisme. Des enfants qui plongent après avoir été élevés dans un environnement familial violent, dans un quartier très pauvre.

Les adolescents sont plus facilement recrutables, parce qu'ils sont issus de familles très pauvres, ils veulent gagner un certain statut au sein de leur communauté et ils veulent souvent obtenir une protection par peur d'être pris pour cible.

Guy Lamb, criminologue

à franceinfo

Ils forment des recrues de choix pour les chefs de gangs, explique le docteur Guy Lamb, criminologue à l'université Stellenbosh en Afrique du Sud : "Les gangs exploitent leur jeunesse, parce que s'ils utilisent un garçon de moins de 18 ans pour commettre un crime, il n'ira pas en prison. Alors que s'il a plus de 18 ans il ira en prison et alors ils perdront un gangster potentiel et de la main d'œuvre pour leur gang." Ces adolescents sont recrutés pour faire les sales besognes, ils sont en première ligne. Entre 2019 et 2020 près de 800 meurtres étaient attribués à des enfants âgés de 10 à 17 ans.

Ce phénomène prend de l'ampleur, les gangs sont de plus en plus violents, les rivalités se sont intensifiées. Au Cap, le taux d'homicide a doublé en dix ans, du fait notamment des gangs. Les spécialistes redoutent que l'explosion du taux de chômage encourage de nombreux jeunes à rejoindre ces bandes. Le chômage dépasse les 60% chez les 15-25 ans.

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