Risques de conflit, famines, coupures d'eau : quelles sont les conséquences de la sécheresse en Ethiopie, au Chili et en Iran ?
Dans le Club des correspondants, franceinfo passe les frontières pour voir ce qui se passe ailleurs dans le monde. Aujourd'hui direction l'Iran, le Chili et l'Ethiopie pour voir quelles y sont les conséquences de la sécheresse et du manque de pluie.
Le manque d'eau est un sujet qui inquète en France depuis plusieurs semaines, et régulièrement depuis plusieurs décennies. Cependant, la France n'est pas le seul pays à connaître des périodes de forte sécheresse. Pire, des pays sont en situation d'alerte dans le monde entier. Direction l'Iran, l'Ethiopie et le Chili qui connaissent des crises rarement égalées.
En Ethiopie, la pire sécheresse depuis 40 ans
Dans la Corne de l’Afrique, la sécheresse qui touche actuellement la région est la pire depuis quarante ans, assurent les Nations Unies. Dans certaines zones, il n’a pas plu depuis 18 mois et dans certains districts, trois saisons des pluies se sont entièrement écoulées sans une seule goutte d’eau. La quatrième saison, censée commencer en ce moment, pourrait elle aussi être sèche.
Concrètement, les sols sont secs. Sur ces sols gisent des milliers de carcasses de chèvres, vaches et chameaux morts de soif dans le désert. Plus de deux millions de têtes de bétails ont déjà fait les frais de la sécheresse dans la region. Les villages et les camps de déplacés sont tellement saturés qu’ils manquent parfois d’eau.
On estime que 20 millions d’individus font face à un risque de famine entre l’Ethiopie, le Kenya et la Somalie.
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D’après l’ONG Oxfam, une personne meurt de faim toutes les 48 secondes dans ces trois pays. Si rien n’est fait, 350 000 enfants pourraient mourir dans les prochains mois. Pour rappel, la dernière grande tragédie dans la Corne de l’Afrique date de 2011, année dans laquelle plus de 250 000 personnes avaient été victimes de la sécheresse en Somalie.
De l’aveu même des agences humanitaires, la réponse n'est pas à la hauteur et pour plusieurs raisons. On peut citer l’instabilité politique en Somalie ou la guerre civile au Tigré, dans le nord de l’Ethiopie. Comme le regrette le coordinateur des affaires humanitaires des Nations Unies Martin Griffiths, l’attention internationale s’est largement détournée du drame humanitaire dans la Corne de l’Afrique pour se focaliser presque uniquement sur l’Ukraine.
En Iran, une tempête de sable conséquence de la désertification
En provenance de l'Irak, de la Syrie et de l'Arabie saoudite, une tempête de sable a poussé le gouvernement iranien à décider la fermeture mardi et mercredi des écoles et des administrations à Téhéran et dans les provinces de l'ouest de l'Iran.
C'est la troisième fois ces dernières semaines que les écoles, les universités et les administrations sont fermées dans toute la partie occidentale de l'Iran, soit plus de la moitié des 32 provinces du pays. "Je n'ai jamais vu une telle chose de toute ma vie", déclarait auprès de franceinfo un habitant d'une soixantaine d'années qui vit dans la province Markazi, à plusieurs centaines de kilomètres de la frontière irakienne.
Sur les réseaux sociaux, de nombreux habitants des villes frontalières avec l'Irak affirment que leur vie est devenue un enfer. "Nous sommes en train de mourir", déclare pour sa part dans une vidéo un habitant d'une ville à la frontière alors qu'il porte un masque d'oxygène pour pouvoir respirer. Il se tenait débout dans une épaisse couche jaunâtre de sable.
Le gouvernement a conseillé à tous les habitants de la moitié occidentale du pays, en particulier les personnes âgées et les enfants, de ne pas sortir dans la rue. Le ministre des Affaires étrangères a également écrit à ses homologues irakien et syrien. Cependant, le gouvernement et les experts iraniens affirment que la construction de nombreux barrages en Turquie depuis une quinzaine d'années a provoqué la désertification de nombreuses régions en Syrie et en Irak, ce qui explique ces tempêtes de sable.
L'eau est retenue en amont sur les fleuves Euphrate et Tigre et n'arrivent plus dans ces deux pays, ce qui peut provoquer un conflit dans le futur entre les différents pays de la région et un exode des populations affectées. À cela, il faut ajouter une sécheresse sans précédent en Iran même.
Au Chili, huit millions de personnes privées d'eau dans les mois qui viennent ?
Au Chili, huit millions de personnes pourraient être affectées par des coupures d’eau dans la capitale Santiago s’il ne pleut pas suffisamment dans les mois qui viennent. Un plan d’urgence a été dévoilé par les autorités il y a quelques semaines pour faire face aux différents scénarios.
Cela fait plus de dix ans que le pays est frappé par une sécheresse et les précipitations diminuent d’année en année. Selon la direction de météorologie du Chili, de mai à juillet, il devrait pleuvoir 115 millimètres d’eau à Santiago, alors qu’en 2006 il en été tombés 130 pour le seul mois de juillet.
Le niveau d'eau des deux principales rivières de la région est extrêmement bas, et elles ne parviennent pas à se régénérer. Le gouverneur de Santiago a récemment présenté un plan de rationnement composé de quatre paliers, l’alerte rouge étant la plus restrictive avec des coupures d’eau de 24 heures tous les quatre, six ou dix jours.
Ce plan a été critiqué par plusieurs associations et activistes car ils considèrent qu’il est injuste de pénaliser les citoyens alors qu’en réalité c’est l’agro-industrie et les grandes entreprises minières qui consomment le plus d’eau au Chili. Ces secteurs possèdent en effet des droits sur l’eau. Il est effectivement possible d’en obtenir ou d’en acheter, l’actuelle constitution écrite sous la dictature le permet. L’eau est donc une ressource qui peut être privatisée. Au fil des années, l’Etat a accordé trop de droits sur l’eau.
Résultat : des rivières entières sont aujourd’hui asséchées et par endroits les nappes phréatiques diminuent drastiquement. Dans certaines zones rurales du nord et du centre du Chili, des villages se font approvisionner par des camions citernes depuis plusieurs années déjà.
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