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Pouvoir d'achat : comment l'Allemagne, l'Espagne et la Hongrie tentent de limiter la hausse des prix des carburants

Dans le Club des correspondants, franceinfo passe les frontières pour voir ce qui se passe ailleurs dans le monde. Aujourd'hui, direction Berlin, Madrid et Budapest où des remises sur les tarifs à la pompe ont récemment été décidées.

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Dans une station service de Rhénanie-du-Nord-Westphalie (Allemagne), mercredi 1er juin 2022.
 (ROBERTO PFEIL / DPA)

Alors que les nouvelles sanctions européennes sur le pétrole russe risquent de faire à nouveau grimper le prix des carburants, comment nos voisins répondent-ils aux difficultés financières rencontrées par la population ? Réponse en Allemagne, en Espagne et en Hongrie.

En Allemagne une baisse des taxes jugée trop faible

En Europe, seuls le Danemark, les Pays Bas et la Suisse affichent des prix à la pompe supérieurs à ceux de l'Allemagne. En avril, le litre de diesel a frôlé les 2,50 euros dans le pays. Le gouvernement sous pression, longtemps accusé d'inaction, a finalement décidé de réduire les taxes sur les carburants. La mesure entre en vigueur mercredi 1er juin.

Face à la colère des professionnels surtout, le gouvernement Scholz a décidé de baisser les taxes sur les carburants, dans la limite de ce qu'autorise l'Union européenne. Concrètement, ça signifie une baisse du prix du litre d'essence de 30 centimes, et de 14 centimes sur le litre de diesel. En théorie, cela aurait dû suffire pour faire passer les carburants sous la barre des deux euros. Mais le soufflé risque de retomber très rapidement. Le gouvernement et les associations de consommateurs accusent en effet les raffineries d'avoir artificiellement fait remonter les prix à la veille ces derniers jours en organisant une mini-pénurie. Résultat : non seulement les prix à la pompe pourraient ne pas diminuer mais ils risquent même d'augmenter malgré la baisse des taxes qui entre en vigueur ce mercredi. 

Le ministère des Finances allemand rappelle que les prix ne vont pas baisser du jour au lendemain puisque les carburants qui se trouvent déjà dans les pompes ont été taxés selon les anciennes grilles. Ce n'est qu'à mesure que les cuves seront remplies que le rabais se fera sentir. Berlin appelle par ailleurs l'Office des cartels à suivre le marché de très près. Il en faudra plus pour calmer la grogne des professionnels, des artisans, des chauffeurs de taxi ou des transporteurs routiers, qui subissent de plein fouet les aléas du prix à la pompe. La fédération des transporteurs ne cesse d'alerter d'un risque de faillites dans le secteur, une vraie menace pour les chaînes d'approvisionnement.

En Espagne, une ristourne provisoire... qui pourrait durer

En Espagne, au mois de mars, la hausse excessive des prix des carburants a donné lieu à un mouvement de grève des transporteurs routiers et à de graves problèmes d’approvisionnement. En ce début juin, la situation est beaucoup plus calme grâce à un accord passé fin mars entre les organisations du transport routier espagnol et le gouvernement de Pedro Sánchez. Cela s’est traduit par des aides directes aux entreprises du secteur, via une enveloppe de 450 millions d’euros, mais aussi par une remise de 20 centimes d’euros par litre de carburant, financée à hauteur de 15 centimes par l’État et de cinq centimes par les compagnies pétrolières.

>> Hausse des carburants : le prix de l'essence reste moins cher en Espagne

Selon le ministère des Transports, ce coup de pouce pourrait représenter une économie mensuelle allant jusqu’à 700 euros par camion, mais qui ne se limite pas aux professionnels du secteur. En effet, depuis le 1er avril, tous les Espagnols bénéficient de cette remise qui s’applique directement à la pompe et permet d’atténuer un peu l’impact de la hausse des prix du carburant. Prévue jusqu’au 30 juin, la réduction de 20 centimes sera très probablement prolongée. Les prix des carburants ne cessent d’augmenter ces dernières semaines, malgré cette remise, faire le plein d’essence est devenu un luxe pour beaucoup d’Espagnols qui parcourent les stations-service pour essayer de payer un peu moins cher.

Depuis le début de l’année, l’essence a augmenté de 18% et le gazole de 24%. Mais si l’on compare avec la même semaine de l’année dernière, la hausse des prix est encore plus forte: +29% pour l’essence et + 38% pour le gazole. Dans ce contexte, le gouvernement étudie la possibilité de prolonger la remise de 20 centimes d’euros par litre de carburant, comme l’a rappelé hier Pedro Sánchez. Mais elle pourrait être modifiée. La ministre du Budget, notamment, mise sur des mesures plus sélectives destinées aux plus défavorisés. Le gouvernement doit trancher d'ici le 30 juin.

En Hongrie, des aides soumises à la préférence nationale

En Hongrie, le prix de l’essence est bloqué depuis novembre dernier. Le gouvernement de Viktor Orban a voulu compenser la baisse du pouvoir d’achat due à l’inflation très élevée dans le pays. Elle a atteint 9 %. Les Hongrois paient le carburant le moins cher d'Europe : 1,42 euro pour un litre de diesel, contre 1,85 euro en France, et 1,88 en République Tchèque. Et le litre de sans plomb 95 vaut 1, 26 euro alors que les Français, eux, déboursent 1,97 euro et les Autrichiens 1,80.

Jusqu’à la semaine dernière, les Hongrois et les étrangers pouvaient faire le plein à ce prix. Aujourd’hui c’est réservé aux conducteurs hongrois et les étrangers n'en bénéficient plus. Le gouvernement a voulu calmer la colère des propriétaires des stations d’essence qui perdaient beaucoup d’argent. Car ce sont eux qui paient la différence.

Le gouvernement hongrois vient par ailleurs d’imposer de nouvelles taxes aux entreprises. Cela concerne les banques, les compagnies d’assurance, les grandes chaînes de distribution ou encore les compagnies d’aviation. Il faut savoir que 85 % des Hongrois se chauffent au gaz. Depuis 2013, ils paient cette énergie 27 % de moins que le prix du marché. Pour continuer à financer cette politique d’énergie à bas prix, le gouvernement Orban a besoin d’argent. D’un côté, c’est rassurant parce que le gaz va rester moins cher. Mais d’un autre côté, ce n’est pas forcément une bonne nouvelle. Le gouvernement va par exemple taxer les compagnies aériennes de 10 euros par billet d’avion. Les Hongrois ne sont pas dupes. Ils savent que les billets d’avion vont forcément augmenter.

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