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En Inde, en Autriche et en Tunisie, quel est l'impact du Covid-19 sur le secteur du tourisme ?

Dans Le club des correspondants, franceinfo passe les frontières pour voir tout ce qui se fait ou se passe ailleurs dans le monde. Aujourd'hui nous partons à New Delhi, Vienne et Tunis pour voir si le tourisme contine de faire recette malgré le coronavirus.

Article rédigé par franceinfo
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Le Taj Mahal a rouvert ses portes le lundi 21 septembre 2020 après six mois de fermeture en raison du Covid-19. (PAWAN SHARMA / AFP)

En France, le secrétaire d'État chargé du Tourisme a encouragé, lundi 12 octobre, les Français à réserver leurs vacances de la Toussaint pour soutenir un secteur très affecté par la crise du Covid-19. Comment les autres pays prisés des touristes étrangers font-ils pour gérer enjeux sanitaire et économique ? Direction l'Inde, l'Autriche et la Tunisie.

Dans le Rajasthan, plus de client depuis février

La crise du tourisme frappe de plein fouet l’Inde, 2e pays en nombre de cas de Covid-19, et où on enregistre encore plus de 70 000 nouveaux malades par jour. Les autorités rouvrent ces jours-ci les principaux monuments mais, sans touristes étrangers, la reprise est incertaine.

Deepak Chaudhary est guide à Jodhpur, magnifique cité médiévale du Rajasthan. Il possède dix belles Jeep des années 60 dont il se servait pour emmener les touristes étrangers à travers le désert et dans les villages de la communauté des Bishnoïs. Mais cela, c’était avant la crise sanitaire. "Notre dernier client est venu en février. Et depuis, les jeeps attendent ici, raconte le guide. Et nous ne les rénovons pas car c’est un gros investissement, et nous n’avons pas de rentrées. Donc nous ne pourrons pas les utiliser avant 2021." 

>>> En Inde, des Français coincés à cause du Covid-19 décident de ne pas rentrer et de rester au soleil.

Les vols internationaux réguliers n’ont pas repris en Inde et les visas touristiques ne sont toujours pas émis. Pour Deepak Chaudhary, cette crise est un désastre familial, car il vit et tient son agence avec son frère. "Toute la famille dépend du tourisme depuis 2002. Nos femmes préparent aussi les repas servis aux clients à la maison."

Nous ne recevons aucune aide du gouvernement, et cela devient très difficile. Nous n’arrivons ainsi plus à payer l’école de nos enfants.

Deepak Chaudhary

guide touristique indien

Le secteur du tourisme représente 7% du PIB indien et 8% des emplois. Ce sont donc des millions de personnes qui, comme Deepak, vont être gravement touchées si le tourisme ne reprend pas dans les mois qui viennent.

Un protocole sanitaire renforcé dans les stations de ski autrichiennes

En Autriche aussi, les professionnels du secteur du tourisme s’inquiètent, à l'approche de l'hiver. Le pays est l’une des destinations de ski les plus prisées au monde et les professionnels du secteur s'attendent à une saison particulièrement difficile. Le pays avait été plutôt épargné par la première vague mais il voit actuellement le nombre de contaminations au coronavirus augmenter fortement, dépassant à plusieurs reprise la barre des 1 000 nouveaux cas quotidiens ces derniers jours. Un chiffre important pour un pays de moins de neuf millions d’habitants et qui pourrait dissuader les touristes étrangers, habituellement très nombreux, de venir skier en Autriche cet hiver. Surtout que le pays doit faire oublier les ratés de la première vague et notamment le scandale d’Ischgl. Cette station, surnommée l’Ibiza des alpes, avait été, en février et mars dernier, le point de départ de milliers de contaminations à travers l’Europe, les autorités étant accusées d’avoir tardé à fermer la station pour des raisons économiques

Pour éviter un nouveau scandale, le gouvernement autrichien a donc annoncé un protocole sanitaire strict pour cette saison. Les mesures comprennent : le port du masque obligatoire dans les télécabines, des tests réguliers et gratuits pour les moniteurs de ski mais aussi une stricte restriction des soirées "après-ski" dans les bars et restaurants des stations. Le but c’est évidemment de rassurer les éventuels visiteurs car la saison d’hiver est vitale pour l’Autriche, explique Ulrike Rauch-Keschmann, du ministère du tourisme : "Le tourisme d’hiver représente un chiffre d'affaires de 15 milliards d'euros environ. C'est d'une importance capitale pour l'ensemble des régions autrichiennes. Il est donc essentiel que l'Autriche ait des règles claires et qu'elles soit respectées, c’est une question de crédibilité." Le ski représente près de 100 000 emplois directs ou indirects en Autriche.

Rouvrir les frontières, un "crime" pour les Tunisiens

Submergée par l'épidémie de Covid-19, la Tunisie regrette désormais d'avoir rouvert ses frontières dès cet été. L'évolution est spectaculaire : le pays est passé – au printemps - du statut de nation exemplaire à celui d'un pays qui sombre dans la crise sanitaire. Le nombre de cas quotidiens en juin se comptaient sur les doigts d’une main. Aujourd’hui, on recense plus de 1 000 cas positifs par jour pour 11 millions d'habitants. Les hôpitaux sont dépassés. Des photos circulent sur les réseaux sociaux montrant des patients à même le sol, à qui on ne peut même pas offrir de lit, dans l’un des plus grands hôpitaux du pays.

Les Tunisiens disent : "ouvrir les frontières fin juin était criminel". Criminel, parce que le gouvernement n’aurait jamais dû céder à la pression des hôteliers et de la diaspora tunisienne, en France notamment, qui réclamait le droit de venir passer l'été au pays. La réouverture des frontières s’est accompagnée d'un relâchement général. Cet été, plus personne ou presque ne portait de masque en Tunisie. Face à la dégradation de la situation sanitaire, les autorités ont récemment pris de nouvelles mesures. Un couvre-feu a notamment été décrété dans les plus grandes villes, mais il n’est plus question de fermer à nouveau les frontières.

De même, il n’est pas question de revenir au confinement total. C’est pourtant ce qu’il faudrait faire, selon de nombreux médecins. On prend des mesures, mais trop timides, disent-ils. Pourquoi ? Parce que le nouveau gouvernement, en place depuis septembre, assure que le pays ne peut tout simplement plus se permettre un confinement général. Le taux de chômage s’apprête à franchir la barre des 20 % et 40% des entreprises artisanales ont fait faillite. La Tunisie n’a pas eu d’autre choix que de contracter un nouveau prêt d’urgence au FMI pour faire face à l'épidémie de Covid-19. Le sentiment des Tunisiens, c’est que la crise ne fait que commencer et que l'État n’a désormais plus les moyens d'y faire face.

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