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Covid-19 : la stratégie du "vivre avec le virus" envisagée en Espagne, Italie et Israël

Dans le club des correspondants, franceinfo passe les frontières pour voir ce qu'il se passe ailleurs dans le monde. Aujourd'hui direction Israël, l'Italie et l'Espagne où l'idée d'une normalisation de la réponse sanitaire fait débat.

Article rédigé par Marie-Hélène Ballestero, Bruce de Galzain - Michel Paul
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6 min
Dans les rues de Madrid (Espagne), le 22 décembre 2021. (JAVIER SORIANO / AFP)

Alors que le nombre de contaminations au variant Omicron continue de progresser en France et dans le monde, certains pays réfléchissent déjà à l'après-pandémie et envisagent de lever les restrictions de façon durable. C'est le cas de nos voisins espagnols et italiens mais aussi d'Israël.

En Espagne : surveiller la maladie comme la grippe saisonnière

Lundi 10 janvier, le chef de l’exécutif espagnol, le socialiste Pedro Sanchez, a annoncé au cours d'une interview accordée à la radio Cadena Ser que le gouvernement était sur la bonne voie pour "ne plus considérer le coronavirus comme une pandémie mais comme une maladie endémique". Il s'agit d'un changement de stratégie, d'une nouvelle manière d’évaluer et de surveiller l’évolution du Covid-19.

Comme l’a souligné mercredi la ministre de la Santé, Carolina Darias, il ne s’agit pas d’un changement immédiat mais d'une évolution qui pourrait voir le jour après la fin de la 6e vague qui touche actuellement l'Espagne. Concrètement, il s’agirait de développer un système de surveillance qui serait basé, comme pour la grippe saisonnière, sur un réseau d’hôpitaux et de médecins sentinelles chargés d’alerter sur la propagation de la maladie. Au lieu de comptabiliser tous les cas de Covid-19 et de tester au moindre symptôme, l’idée serait de constituer un échantillon statistiquement significatif qui permettrait de comprendre la propagation du virus.

Au sein des professionnels de santé, les avis sont partagés, même chez les médecins. Une des trois organisations, la Société Espagnole de Médecins de Famille et Communautaire (semFYC), soutient pleinement cette idée, comme l’a fait savoir mardi María Fernandez, la vice-présidente de l’organisation : "C’est le moment d’être courageux et de faire un pas en avant. Face au variant Omicron, qui présente une faible mortalité, même s’il reste très contagieux, et grâce à un taux de vaccination supérieur à 90%, nous devons envisager et commencer à parler des changements de protocoles, après la fin de cette 6e vague".

Mais face à cet optimisme affiché, les deux autres organisations de médecins d’Espagne ont appelé à la prudence. D’après eux, il est encore trop tôt pour "banaliser" le Covid-19 et le rétrograder au rang des maladies endémiques. Un débat qui divise aussi les Espagnols, conscients qu’il ne faut pas aller trop vite en besogne même s'ils rêvent de retrouver peu à peu leur vie d’avant.

L'Italie voudrait en finir avec l'obsession des chiffres

En Italie aussi cette volonté de normalisation fait débat et le modèle espagnol inspire. Certains virologues italiens s'inquiètent de l'hystérie et de la course aux tests à tout prix. L'hystérie c'est la communication chaque soir du nombre de cas positifs, du nombre de morts, etc. Un infectiologue remet les pendules à l'heure : "Sans vaccin, le Covid-19 en Italie était mortel dans 2 à 3% des cas, nous avions à son apogée chaque jour 30 000 à 40 000 infections et 700 à 900 décès. Aujourd'hui avec Omicron il y a en moyenne 172 500 cas et 200 décès par jour, soit une létalité de 0,12%."

L'Italie, pays traumatisé par les premiers morts du Covid-19 il y a deux ans, est-elle prêt à tolérer les 200 morts par jour en supprimant les restrictions ? A priori non, si l'on en croit les dernières mesures strictes décidées par les autorités à l'égard des antivaccin. Aujourd'hui les régions – qui sont puissantes et écoutées – demandent au gouvernement de simplifier la vie des personnes testées positives au Covid-19 mais qui sont vaccinées et n'ont pas de problème de santé. Pour les asymptomatiques, l'idée serait de réduire l'isolement à cinq jours et même de supprimer le test négatif à la fin. Quant à l'hystérie des chiffres, les cas positifs asymptomatiques pourraient être exclus du bulletin quotidien. La Lombardie a même demandé au ministère de la Santé de ne plus compter les patients hospitalisés pour d'autres maladies et qui ont ensuite été testés positifs, afin de "donner une idée plus réaliste et objective de la pression exercée sur les hôpitaux par le Covid".

Israël : se concentrer sur les plus âgés 

Vivre avec le Covid-19, c'est aussi la nouvelle philosophie en Israël, le pays qui le premier avait vacciné en masse sa population. Le gouvernement est accusé d'avoir baissé les bras face à l’offensive du variant Omicron. Mais les responsables de la santé publique évitent soigneusement de parler d'immunité collective, une expression controversée. Mais la politique de Naftali Bennett semble claire : protéger au maximum les plus de 60 ans et les personnes les plus fragiles. Pour les autres, en quelque sorte, c’est "chacun pour soi et Dieu pour tous".

Les tests PCR dont les résultats étaient annoncés à grand fracas tous les jours sont désormais réservés exclusivement aux plus âgés qui peuvent recevoir une quatrième dose de vaccin. La majorité de la population israélienne doit se contenter des tests antigéniques ou des auto-tests pratiqués à la maison. Une nouvelle approche très décriée par l’opposition. Les quarantaines ont par ailleurs été raccourcies. Et les frontières du pays sont désormais grandes ouvertes pour les touristes du monde entier.

>>> Vaccination contre le Covid-19 : Israël a commencé à administrer une quatrième dose aux personnes vulnérables

Face à la montée des nouvelles contaminations, aucune nouvelle mesure n'est envisagée. Aucune, à ce stade, en tout cas. Pas de confinement en vue. Mais les commerçants le proclament : c'est tout comme. Les centres commerciaux sont vides et les autorités n'ont pas l'intention, à l’heure actuelle du moins, d’indemniser les travailleurs indépendants.

Les embouteillages ont quasiment disparu sur les routes, les Israéliens qui ne sont pas en quarantaine préférant quand ils le peuvent rester chez eux. Les absences sont également très nombreuses dans les établissements scolaires. Pour la journée de mercredi, on a compté près 50 000 nouveaux cas pour une population de neuf millions d’habitants. Les spécialistes estiment que ces chiffres pourraient quadrupler avant que le pic ne soit atteint. Cela devrait se produire dans deux semaines, estime-t-on.

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