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Reportage
"Je veux rentrer à l'école !" : en Ukraine, certains enfants font leur rentrée pour la première fois depuis le début de la guerre
Malgré la guerre, en Ukraine, la vie doit continuer. Et ce début de mois de septembre marque la rentrée scolaire pour plus de trois millions d'enfants et adolescents ukrainiens.
Cette rentrée commence un peu à la gare de Kiev pour Vadim. Il a treize ans, n'a pas encore de cartable sur le dos mais une valise qu'il traîne sur le quai. Après un an passé à l'étranger pour fuir la guerre avec sa mère et sa petite sœur, l'adolescent s'apprête à retrouver son collège ukrainien, en présentiel qui plus est. "En Irlande, mes amis me manquaient, dit-il. L'école normale me manquait aussi parce que là-bas, ils apprenaient un programme que je connaissais déjà. Donc oui, je suis content de rentrer à mon école."
>> Ukraine, une jeunesse dans la guerre : l'école aux abris (2/5)
"On a beaucoup réfléchi avant de rentrer, précise Anna, la mère de Vadim. Les enfants allaient à l'école en présentiel en Irlande. Mais l'enseignement était exclusivement en anglais, alors ils ont dû faire le maximum pour comprendre et s'adapter. Ils sont donc très contents de rentrer et on espère qu'ils pourront faire sereinement leurs études ici."
Grandir en Irlande, ce n'était pas ce que voulait Anna pour sa petite fille de 8 ans, Arina. "À l'école irlandaise avec ses professeurs, c'était difficile pour elle. Et en plus, la première rentrée de sa vie, c'était là-bas, en Irlande. Elle ne sait donc pas ce que c'est l'école en Ukraine. La rentrée, c'est un moment important pour elle, c'était l'une des raisons de notre retour."
"Courir tous ensemble" dans la cour d'école
Sur le quai de la gare, beaucoup de familles sont de retour à Kiev pour la rentrée. Dans un des parcs de la capitale, beaucoup d'enfants qui profitent des dernières heures des vacances. Enfin, pas tous : "Je m'ennuie en vacances, je veux rentrer à l'école", assène Stepan, huit ans. Dans son établissement, c'est retour en présentiel à 100 %, ce qui n'était pas le cas depuis le début de la guerre. "À la récré, on peut courir tous ensemble, se réjouit Stepan. On joue et on papote pendant les cours."
Irina, la maman de Stéphane en sourit. "Je suis pour que les enfants retournent à l'école en présentiel parce qu'ils apprennent mieux qu'à la maison. Et puis, les professeurs ont un contact direct avec les élèves. Ils peuvent savoir quels sont ceux qui ont besoin de plus d'attention."
Une réouverture sous conditions
Le retour de l'école en présentiel n'est pas généralisé pour autant en Ukraine. Il se décide au niveau local, en fonction de la situation sécuritaire de chaque région. Dans celle de Kiev, le retour en présentiel a été recommandé par les autorités, mais à certaines conditions. Avec une règle capitale : pour accueillir les élèves, les écoles doivent posséder un abri en cas de bombardement.
Olena Sikoura est la directrice d'un établissement scolaire qui accueille plus de 800 élèves. En cette rentrée, elle nous fait visiter l'abri qu'elle a fait aménager en partie pendant les vacances scolaires. "Là, ce sont deux petites salles pour les tout-petits. Regardez : là, on a de l'eau potable et là, les toilettes. On a fait des travaux : les sanitaires, la ventilation, la peinture."
Olena est bien sûr ravie de retrouver les enfants. Mais elle est aussi consciente du poids qui pèse sur ses épaules. Il y a encore trois jours, Kiev était la cible de frappes russes. Avec les enfants en présentiel à l'école toute la journée, elle est bien consciente que sa responsabilité est immense.
"Notre mission principale, c'est de sauvegarder les enfants, les aider pendant cette guerre et surtout ne pas perdre cette génération qui est l'avenir de notre pays."
Olena Sikouraà franceinfo
"On comprend bien qu'on est responsable de leur sécurité. Pour nous et pour les enfants, c'est difficile. C'est pourquoi il nous faut agir ensemble. Les mamans travaillent dans les hôpitaux par exemple. Les papas sont dans l'armée, ils veillent sur nous et nous, nous veillons sur leurs enfants."
Des enseignants partis au front
Dans l'établissement d'Olena, toute l'équipe pédagogique est au complet en cette rentrée. Mais ce n'est pas le cas partout. Certains enseignants, même s'ils n'en avaient pas l'obligation, ont rejoint les rangs de l'armée. C'est le cas de cette jeune institutrice, Maria, qui ne retrouvera pas ses élèves cette année : "Je ne retournerai à mon métier d'institutrice qu'après la fin de la guerre. C'est mon choix. J'ai toujours dit à mes élèves 'quand vous commencez quelque chose, allez jusqu'au bout'. Alors, tant qu'il y a la guerre, j'envisage de rester là. Mais après je reviendrai auprès de mes élèves, sans aucun doute. Quand la guerre sera finie, j'espère alors que les enfants pourront voir le monde, voyager, commencer à vivre leur vie à 100 %."
Et puis, un jour, promet Maria, elle racontera son expérience de la guerre aux enfants. Mais bien sûr, dit-elle, sans tout leur dire. "On ne peut pas tout dire aux enfants", ajoute-t-elle.
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