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Israël-Palestine : les racines de la colère

Bombardements de l'armée israélienne sur Gaza, salves de roquettes palestiniennes sur Israël. Le Hamas et Israël sont en conflit ouvert depuis huit jours. Une nouvelle guerre qui trouve ses racines à Jérusalem-Est.

Article rédigé par franceinfo - Frédéric Métézeau, édité par Ariane Schwab
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4 min
À Sheikh Jarra, quartier administré par Israël de Jérusalem-est, des Palestiniens menacés d'expulsion affirment leur volonté : "Nous sommes là pour rester." (FRÉDÉRIC MÉTÉZEAU / RADIO FRANCE)

Aucun signe d'accalmie depuis huit jours d'affrontements entre l'État hébreu et les Palestiniens de Gaza qui ont fait déjà 222 morts, majoritairement palestiniens. Les nouvelles racines du conflit-israélien se trouvent plus précisément à Sheikh Jarrah.

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Ce quartier de Jérusalem-Est est habituellement une bulle de calme, avec de la verdure, de beaux jardins, des maisons à un étage, fraîches et douillettes. Mais plusieurs familles palestiniennes y sont menacées d'expulsion sur décision judicaire. Depuis un mois c'est donc une zone de tensions et d'affrontements.  

Le conflit territorial  

L'avocate israélienne Nili Naouri, membre du parti de droite au pouvoir Likoud, conseille les colons juifs qui veulent venir s'installer à la place des Palestiniens.     

Un squatter, on le dégage. Les Arabes ne reconnaissent ni notre droit historique ni notre droit légal.

Nili Naouri, avocate israélienne

à franceinfo

"Ce qu’on appelle le peuple palestinien, qui est véritablement le plus gros bluff de l’Histoire, n’est qu’une entité créée de toutes pièces, qui est venue dans le courant du XXe siècle, soutient Nili Naouri. Nous sommes un peuple qui est vieux de 4 000 ans. C’est écrit dans la Bible. Et quand vous faites des fouilles archéologiques, vous découvrez uniquement l’histoire du peuple juif". 

Maïsoun Moahmad Rocheh est palestinienne. Elle habite à Sheikh Jarrah. Et samedi soir après un banal contrôle, elle a été molestée par la police devant chez elle. Al Jazeera et les réseaux sociaux ont diffusé la scène.

"Tu sais ce qu’elles m’ont fait, ces trois policières, alors qu’on n’avait pas d’armes dans la voiture ? Elles nous ont frappé. Ma fille a appelé son papa à l’aide qui n’a pas pu s’approcher", raconte Maïsoun Moahmad Rocheh.   

Ça nous donne de la force quand le Hamas répond, résiste et frappe les Juifs. On n’est pas assommés, on est forts !

Maïsoun Moahmad Rocheh, une Palestinienne habitant à Sheikh Jarrah

à franceinfo

Maïsoun Mohamad Rocheh et sa fille, habitantes de Sheikh Jarrah, quartier administré par Israël de Jérusalem-est, molestées samedi 15 mai 2021 par la police. (FRÉDÉRIC MÉTÉZEAU / RADIOFRANCE)

Le Hamas s'est effectivement posé en champion des Palestiniens de Jérusalem, ville dont le statut juridique est contesté.

Le conflit politique

Les Palestiniens revendiquent comme capitale la partie est de Jérusalem. "En 1967 les Israéliens s’emparent de Jérusalem-Est. Jusque-là, ça ne pose pas véritablement de problèmes à la communauté internationale jusqu’en 1980 où une loi fondamentale israélienne revendique la souveraineté israélienne sur la totalité de Jérusalem, explique l'historien Vincent Lemire, spécialiste de l'histoire de la ville, qui dirige le Centre de recherche français à Jérusalem. Sur le terrain, c’est une ville qui reste divisée. On voit que la ligne verte, la ligne de séparation entre l’Est et l’Ouest ressurgit à chaque crise avec des checkpoints."   

Le conflit religieux  

Si Jérusalem-Est est aussi importante, c'est à cause de sa dimension religieuse, autre élément de conflit car elle abrite la vieille ville avec le mur des Lamentations, sacré pour les Juifs et juste au-dessus, pour les musulmans, l'esplanade des Mosquées et la mosquée Al-Aqsa. Là aussi il y a eu des violences.

Le vendredi 7 mai, après des semaines d'échauffourées dans le secteur, des policiers israéliens sont entrés dans Al-Aqsa avec des grenades. Là aussi la scène été filmée et a ulcéré les Musulmans mais pas seulement, raconte Moussa. Ce Palestinien était à l'intérieur lors de ces incidents. "Les affrontements à Al-Aqsa ont conduit au soulèvement de toute la jeunesse palestinienne. Les Israéliens nous divisent depuis 1948 et 1967 mais tout ça prouve que le peuple palestinien est uni, même à l’étranger, même dans les camps de réfugiés en Jordanie et au Liban".

Cette esplanade des Mosquées est considérée comme un lieu sacré par les Juifs les plus religieux qui l'appellent Mont du Temple. "Jérusalem est le cœur du peuple de juif, de la Nation juive. Mohamed n’a jamais mis les pieds à Jérusalem. Ca n’a jamais existé", affirme l’avocate israélienne Nili Naouri.  

La bataille démographique  

Dernier ingrédient au cocktail explosif : la bataille démographique pour Jérusalem, rappelle l’historien Vincent Lemire : "C’est assez contre-intuitif mais la population palestinienne de Jérusalem-Est ne cesse d’augmenter dans des proportions plus importantes que la population juive de Jérusalem-Ouest."

La population palestinienne de Jérusalem représente aujourd’hui 40% de la population totale de la ville contre 25% en 1967.

Vincent Lemire, historien

à franceinfo

Voilà donc pourquoi les colons israéliens font tout pour expulser des Palestiniens de Jérusalem-Est. Quatre piliers de la colère qui alimentent le conflit depuis près de 75 ans.  

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