Fin de sursis sur l'obligation vaccinale pour 300 000 soignants réfractaires : "Je suis en train de chercher du travail en usine"
L'obligation vaccinale pour les soignants et les personnels travaillant au contact de personnes vulnérables notamment entre en vigueur mercredi. Ceux qui n'ont pas reçu au moins une dose de vaccin anti-Covid seront suspendus et privés de salaire, sauf exceptions prévues par la loi. Mais certains s'y refusent toujours.
"Non, je ne céderai pas !". Comme 2,7 millions de personnes en France, Roxane est concernée par l'obligation vaccinale contre le Covid-19. Mais comme 300 000 autres personnes dans son cas, elle s'y refuse. Cette mère de famille de 33 ans travaille en tant qu'aide médico-psychologique dans une association en Dordogne, qui accompagne des adultes en situation de handicap. Bien qu'elle s'expose à une suspension de contrat sans salaire à compter de mercredi 15 septembre, elle est catégorique : "Nous sommes encore dans une phase expérimentale. J’entends trop parler des effets secondaires", se justifie-t-elle. "Je ne vois pas l’intérêt (du vaccin), sachant que je peux quand même attraper le Covid et que je peux le transmettre", ajoute-t-elle.
Je n’ai pas envie de mettre ma santé en jeu."
Roxane, aide médico-psychologiqueà franceinfo
Selon les derniers chiffres communiqués par le ministère de la Santé, qui remontent au dimanche 12 septembre, 95 % des professionnels de santé libéraux sont vaccinés contre le Covid-19. Dans les hôpitaux et les EHPAD, ce taux s'élève à 89 %. Les réfractaires aux vaccins sont donc minoritaires. Sur la cinquantaine de salariés que compte l'association pour laquelle travaille Roxane, sept, dont elle, ne sont toujours pas vaccinés. Ils partagent les mêmes craintes, le même manque de confiance et surtout la même détermination. "On m’a toujours dit que quand tu ne veux pas d’un soin, il n’y a pas d’obligation de soin. Donc même avec un cancer, si quelqu’un dit qu’il faudrait une chimio mais que la personne refuse, on ne lui donne pas de chimio. Je veux décider de ce que je vais injecter dans mon corps. C’est ma dernière limite", explique Carole, aide-soignante.
J’adore mon travail, c’est très triste d’en arriver là.
Cathy, aide médico-psychologiquefranceinfo
Quitter son emploi d'aide médico-psychologique est un déchirement pour Cathy mais la colère prend le dessus. "C’est comme si on me pliait le bras et qu’on me faisait une injection", explique-t-elle. Cette soignante qui vit seule avec ses deux enfants s'interroge sur son avenir mais pour le moment elle vit "au jour le jour", raconte-t-elle. "Je suis en train de chercher un petit taf, du travail en usine. Je me suis renseignée pour enchaîner des CDD. Du travail, il y en a", dit-elle. Une de ses collègues, non-vaccinée également, a d'ores et déjà suspendu son crédit immobilier pour ne pas se mettre en difficulté financièrement.
Recours aux agences d'intérim pour l'employeur ou congés anticipés pour l'employé
Parmi les salariés de cette structure, d'autres ne connaîtront pas cette période de doute. Virginie a reçu ses deux injections en avril, mais cette éducatrice respecte le choix de ses collègues qui refusent de se faire vacciner contre le Covid-19. "Je suis qui pour leur dire ‘va te faire vacciner ou fais ci, fais ça ?' Ils acceptent mon choix et moi j’accepte le leur. Je ne supporte pas les injonctions, on n’est pas des enfants", insiste-t-elle.
Le personnel non-vacciné de l'association n'est déjà plus inscrit sur les plannings. La direction a fait appel à une agence d'intérim pour assurer les remplacements. D'autres d'établissements de santé ont trouvé un arrangement avec certains salariés qui poseront leurs congés afin de déstabiliser le moins possible l'organisation interne. Enfin, il y aura une tolérance pour ceux qui prouveront qu'ils ont pris rendez-vous dans les prochains jours afin de se faire vacciner.
Les soignants non-vaccinés ne risquent pas tous la suspension
Les personnels concernés par la vaccination obligatoire et qui ne le seraient pas ne seront pas suspendus s'ils sont actuellement en arrêt maladie. Mais pour éviter toute tentation, la Sécurité sociale prévient que les contrôles seront renforcés pour débusquer les arrêts maladie de complaisance. Deux autres exceptions sont également prévues dans la loi. Premièrement, les personnes qui doivent attendre entre trois et six mois après avoir contracté le Covid-19 pour pouvoir être vaccinées. Puis celles qui présenteront une ordonnance de contre-indication médicale parce qu'elles sont allergiques aux vaccins par exemple. Mais cela concerne tout au plus quelques centaines de cas.
Par ailleurs, lors d'une conférence de presse le 26 août dernier, le ministre de la Santé Olivier Véran a annoncé que "considérant la situation épidémique et la mobilisation totale de tous les soignants, de tous les directeurs d’hôpitaux, pour sauver un maximum de vies dans des conditions difficiles, on n’allait pas leur rajouter la contrainte de l’obligation vaccinale." Il a toutefois précisé que cette dispense ne concernait que "les seuls territoires ultra-marins touchés par la vague", [la Martinique et la Guadeloupe ] et qu'elle était temporaire. Depuis, le ministère de la Santé a précisé qu'il y aurait effectivement une souplesse dans les contrôles, mais uniquement pour les personnels qui travaillent dans les unités Covid de ces départements.
Mais l'obligation vaccinale concerne la majorité d'entre eux
L'obligation vaccinale s'impose donc à tous les autres personnels concernés par la mesure, à savoir ceux qui travaillent dans un service non-Covid à l'hôpital, dans les Ehpad, aux professionnels de santé libéraux (dentistes, sage-femmes, généralistes, pharmaciens, etc.), à ceux qui travaillent auprès de personnes vulnérables comme dans les structures d'accueil de personnes handicapées, ou encore les aides à domicile.
Par ailleurs, les soignants ne sont pas les seuls concernés, il y a également les vigiles, les informaticiens, les secrétaires médicales ou encore les cuisiniers de ces structures. Mais seront-ils vraiment sanctionnés, au risque de déstabiliser le système de soins ? En Guadeloupe et Martinique par exemple, seuls un tiers des personnels d'Ehpad sont aujourd'hui vaccinés.
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