Climat : Ces chercheurs qui croient en la science comme remède au changement climatique
Plus les pays traînent a réduire leurs émissions de gaz a effet de serre, plus les partisans d’une intervention sur le climat se font entendre.
Capter et stocker le gaz carbonique et, en théorie, maîtriser les rayons du soleil, c'est aujourd'hui possible. On trouve une vingtaine de machines dans le monde capables de stocker le gaz carbonique. L'une d'elles se trouve à Lyon, dans un laboratoire de l'Institut français du pétrole et des énergies nouvelles. Ce prototype est capable de stocker le gaz carbonique des usines pour le stocker dans le sous-sol. "C'est un peu comme une machine à laver", présente Vania Santos Moreau, coordonnatrice du développement de cette machine.
"Au lieu de laver le linge, on va laver une fumée, un gaz. On va mettre notre gaz et faire sortir le CO2. Ça fait plus de dix ans que nous travaillons sur ce procédé et il marche à cette échelle. On va faire la démonstration sur le site d'ArcelorMittal à Dunkerque à une échelle industrielle", indique Vania Santos Moreau.
L’Union européenne a investi 15 millions d’euros dans cette expérimentation prévue pour la fin 2021. La Norvège, les Pays-Bas et le Royaume-Uni travaillent également sur le stockage du CO2 en mer du Nord.
Ce n'est pas de la science fiction et heureusement, parce que sinon, on n'aurait aucune chance d'atteindre les objectifs de neutralité carbone en 2050.
Florence Delprat-Jannaudà franceinfo
"On a des solutions qu'on prépare pour demain, à horizon 2025, mais on travaille encore sur des procédés encore plus innovants, précise Florence Delprat-Jannaud, en charge des programmes de captage de CO2 au sein de l'Institut français du pétrole et des énergies nouvelles. Et puis, on a des procédés vraiment en rupture pour enlever le CO2 qui est présent dans l'atmosphère." Le coup est en revanche élevé et le modèle économique pas encore rentable en Europe.
De la géo-ingénierie à l’intervention climatique
L’étape suivante de la recherche touche à la "gestion des rayonnements solaires", une intervention directe sur le climat dont le principe est de placer un filtre dans les nuages pour contenir les températures, comme lors des éruptions volcaniques. En pratique, il s'agit d'injecter des particules de soufre ou de la craie dans la stratosphère a une dizaine de kilomètres d’altitude afin de créer un effet miroir. Des chercheurs Américains sont prêts a lancer l’expérience en Suède, le projet scoPEX.
Le climatologue Olivier Boucher est convaincu que cela peut marcher. "Les particules qui sont tombées dans la stratosphère diffusent le rayonnement, c'est à dire qu'elles renvoient le rayonnement solaire un peu dans toutes les directions et une partie va être envoyée vers l'espace, indique le directeur adjoint de l’institut Pierre Simon Laplace et directeur de recherche au CNRS. C'est de l'énergie en moins pour la planète et donc un système climatique qui va répondre à ce forçage en étant un peu plus froid. Cette méthode pourrait être efficace pour refroidir le climat jusqu'à 2 ou 3 °C, c'est sans doute possible."
Une montagne d’incertitudes et de risques.
La limite de ce projet est qu’il faut injecter le soufre en permanence pour maintenir le refroidissement, précise Olivier Boucher. Il faudrait le faire pendant des décennies. C’est aussi une réponse partielle aux effets du réchauffement climatique et le risque de perturber le climat est réel. "À l'heure actuelle, ce n'est pas un simple radiateur avec un thermostat, c'est beaucoup plus compliqué que ça, beaucoup plus incertain, explique Slimane Bekki chercheur au laboratoire Latmos du CNRS. Il y a énormément de risques à le déployer mais on n'y est pas du tout pour le moment. On n'a vraiment pas du tout les connaissances nécessaires."
Pour l’instant, ce type d’intervention n’est pas encadré. Il n’existe pas de gouvernance internationale sur la gestion du rayonnement solaire et ses effets collatéraux. Cette solution est donc encore considérée par les chercheurs comme le dernier recours face au changement climatique. "Les scientifiques étudient ces méthodes, précise le climatologue Olivier Boucher. On ne peut pas faire l’économie d’un plan B au cas où on ait un réchauffement plus important, à 2,5 ou 3 ou 4 degrés où il sera très difficile de s’adapter et où les générations futures seront peut-être contentes, malgré tout, d’avoir une connaissance sur ces techniques là."
Cette méthode peut cela dit compter sur des soutiens de poids. Le milliardaire co-fondateur de Microsoft Bill Gates finance l’un des groupes de chercheurs en pointe sur le sujet, à Harvard.
Un questionnement à venir
"Il va y avoir ce type de débats sur la place de la technologie, la place des comportements, anticipe Rolland Seferian, ingénieur chercheur au centre de recherche national de recherches météorologiques. En France, on est plus à même de changer nos modes de comportement. Ce qui n’est pas forcément le cas dans d’autres pays du monde. Et malheureusement, ces autres pays qui sont très enclins au volet technologique sont les plus gros émetteurs."
L’entrée des ingénieurs dans la problématique du climat fait donc entrer un nouveau risque, géopolitique, autour duquel aucune structure internationale n’a été montée pour en gérer les impacts.
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