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"C'était comme un long cauchemar" : les élèves ukrainiens retrouvent leur école après six mois de guerre

Comme en France, de nombreux élèves ukrainiens retrouvent le chemin de l'école jeudi 1er septembre. Une rentrée scolaire marquée par la guerre qui continue dans leur pays et qui empêche certains de revenir en classe.

Article rédigé par franceinfo - Maurine Mercier
Radio France
Publié
Temps de lecture : 5min
Une salle de classe installé dans un abri anti-bombes dans une école de Kiev, le 29 août 2022. (GENYA SAVILOV / AFP)

Dans les écoles de Kiev, le brouhaha des enfants dans les couloirs résonne à nouveau, après plus de six mois d'absence. Ces voix d'enfants qui font du bien à entendre et qui disent tout du retour à une vie presque normale. Depuis le début de l'invasion russe en février, les écoles ukrainiennes étaient fermées, alors ce retour à l'école était très espéré. 

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Les parents et les enfants ont souvent pris les devants, ils n'ont pas attendu le jour de la rentrée pour retrouver leur école. Ils ont défilé toute cette semaine dans les établissements pour vérifier notamment que l'école dispose d'un abri anti-bombes. Les familles qui ont la chance d'avoir à proximité de leur domicile une telle école pourront décider d'y envoyer ou non leurs enfants. 

"Ces derniers mois, c'était comme un très long cauchemar."

Katia, 9 ans

à franceinfo

Katia, 9 ans, s'apprête à retrouver les bancs de sa classe, après avoir passé six mois à étudier tant bien que mal derrière son écran, parfois avec le bruit des bombes en arrière-plan. "Mes amies me manquent, ma prof, la récréation. Tout au fond de moi, oui, j'ai peur, mais j'ai vraiment envie de retrouver l'école", raconte-t-elle. Katia a retrouvé son enseignante pour un long calin, image du soulagement de retrouver enfin un semblant de vie normale. 

Seules les écoles qui disposent d'un abri pourront ouvrir

Cette rentrée est un défi pour les autorités ukrainiennes. Le ministère de l'Éducation n'autorise que les écoles disposant d'un abri à ouvrir, ce qui représente une école sur deux dans le pays. Plus de 2 000 écoles ont été endommagées, voire carrément détruites depuis le début de la guerre. "On a hésité d'abord, mais après avoir vu l'abri, nous sommes rassurés", confie la maman de Katia.

"Bien sûr je suis inquiète, c'est la guerre. Mais je suis heureuse que ma fille puisse quitter l'école en ligne."

maman de Katia

à franceinfo

Un soulagement de retourner à l'école, mais aussi un geste politique pour les parents de la petite Katia. Son père évoque un geste de "résistance" dans ce contexte de guerre. À chaque alerte aérienne dans le secteur, les enfants devront donc descendre au sous-sol, dans les abris anti-bombes. Ils ressemblent à des caves, avec les murs, des chaises et des tables installées pour accueillir les enfants. Des salles de classe aux allures de bunkers. 

Pendant toute la semaine qui a précédé la rentrée, Svetlana Bourakova, la vice-directrice de cette école de Kiev a fait visiter chaque jour ces abris aux parents, affichant aussi un ton rassurant. "Certains de nos collègues sont partis combattre sur le front, alors nous ici, nous devons travailler aussi !", explique-t-elle. 

"Nous allons continuer, pas seulement jusqu'à la fin de la guerre, mais jusqu'à notre victoire."

Svetlana Bourakova, vice-directrice d'une école à Kiev

à franceinfo

Derrière une sérénité affichée, l'enseignante ne peut pas complètement dissimuler la pression et l'émotion qui pèse sur elle en ce jour très particulier. "Oui, j'ai peur, finit-elle par concéder dans un sanglot, c'est la première fois que je m'autorise à pleurer depuis six mois." "Mais vous voyez, nos enfants sont beaux. À aucun moment, je n'ai pensé à partir, quitter cette école", poursuit-elle

De nombreux enfants ne reprennent pas l'école normalement

Ce retour à l'école ne concerne pas tous les enfants ukrainiens. Ceux dont l'école n'est pas équipée d'un abri notamment. C'est le cas de Vainona, 9 ans, qui habite dans la banlieue de Kiev et qui fera sa rentrée à la maison. "Je ne veux pas aller à l'école, parce qu'il n'y a pas d'abri pour se protéger des bombes", raconte-t-elle. L'envie de retrouver sa classe est tout de même très forte : "j'irai sinon, bien sûr que j'aimerais", lâche la petite fille. 

Sa maman, elle, est beaucoup plus radicale. "Il faut vraiment être idiot pour laisser ses enfants retourner en classe !", s'agace-t-elle. "Pas un seul lieu n'est sûr en Ukraine, bien sûr que je suis fâchée !", continue la mère de famille .

"On fait face à une invasion et on devrait envoyer gaiement nos enfants à l'école ? Pour que ce cinglé de Poutine qui dirige cette grande puissance de merde nous souhaite une bonne rentrée en tirant sur nos enfants ?"

maman de Vainona

à franceinfo

Une colère non-dissimulée pour cette maman qui estime que l'Ukraine "a déjà perdu assez d'enfants comme ça". Sa fille Vainona ne retrouvera pas cette année une scolarité normale comme de nombreux autres écoliers ukrainiens. Il est aujourd'hui impossible de connaître le nombre exact d'écoles qui pourront rouvrir. 

Sur les 23 000 établissements scolaires du pays, près de la moitié dispose donc d'un abri selon le ministère de l'Éducation, mais ce chiffre est bien moins important selon le ministère des Situations d'urgence. Selon un récent sondage, entre 50 et 60 % des parents sont contraints ou préfèrent que leur enfant poursuive son éducation à distance à cause de la guerre.

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