Des journalistes se sont infiltrés dans des visioconférences interministérielles : "Déjà que l'ambiance n'est pas top..."
Matignon hausse le ton contre les cabinets ministériels, après que des journalistes ont réussi à s'inviter dans des réunions confidentielles.
L’histoire est hallucinante. A deux reprises, des journalistes se sont invités à des réunions interministérielles, des "RIM" dans le jargon politique. C’est lors de ces réunions que le Premier ministre ou ses conseillers arbitrent des décisions qui concernent plusieurs administrations. Sur la loi Climat par exemple, pour trancher un sujet technique entre l'Écologie et l'Économie. Comment se fait-il que des journalistes aient pu assister à ces conclaves sans se faire remarquer ? Et bien tout simplement parce que crise sanitaire oblige, les réunions du gouvernement, qui peuvent rassembler plus d’une soixantaine de personnes, se tiennent désormais en visioconférence. Une fois connecté, il suffit de ne pas allumer la caméra de son ordinateur, ni son micro. Impossible ou presque de savoir qui est là. Et le tour est joué.
N’importe qui ne peut pas pour autant s'infiltrer dans une réunion du gouvernement. Il faut avoir des codes pour se connecter, générés par Matignon qui les envoie aux seuls conseillers concernés par le thème de la réunion. Mais manifestement, ces codes circulent plutôt aisément. Ce qui crée une atmosphère délétère entre cabinets ministériels. "Déjà que l’ambiance n’est pas top avec le télétravail, si en plus on doit se suspecter les uns les autres, ça ne va pas aller", souffle un conseiller. Un autre s’agace "de ne plus avoir d’espace de confidentialité pour travailler sereinement".
Nouvelle consigne : faire l'appel avant la visio
Pour éviter que ces intrusions ne se reproduisent, Matignon a adressé une instruction à tous les directeurs de cabinets, avec un protocole à suivre : faire l’appel en début de chaque visioconférence, pour que chaque participant s’identifie à l’oral, et ensuite vérifier régulièrement que les personnes connectées correspondent à celles qui ont répondu à l’appel. A défaut, changer de canal de discussion. "Ce qui est sûr, reconnaît un membre de l’exécutif, c’est qu’on n’a pas pris la solution la plus sécurisée." Parce que ces réunions, souvent, se tiennent sur des logiciels grand public, comme Zoom par exemple.
Une intrusion en Conseil des ministres, qui se tient lui aussi en visioconférence, n'est pas possible, assure-t-on à franceinfo. Il utilise une application et une ligne sécurisées. A tel point qu'au ministère de l’Economie par exemple, il faut redescendre au "bunker" pour pouvoir se connecter. D’autres ministres se rendent chaque semaine à Matignon, pour accéder à la réunion depuis une salle sécurisée. "Et dès que les sujets sont encore plus sensibles, nous dit-on, c’est traité en Conseil de défense, en présentiel, à l’Elysée". Là, de fait, c’est plus difficile de forcer la porte d’entrée.
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