Élections européennes : en Pologne, malgré sa défaite aux législatives le Pis, parti ultraconservateur, conserve un poids considérable

À moins de six mois du scrutin, si les polonais ont tourné le dos au PiS, les thèmes de l’immigration et de la souveraineté, chers au parti ultraconservateur, risquent néanmoins de s’imposer dans le débat lors la campagne.
Article rédigé par franceinfo - Martin Chabal
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Les Polonais ont  pour Donald Tusk, pro-européen convaincu, ancien président du Conseil de l’Europe, lors des dernières élecions législatives (photo d'illustration , à Varsovie, le 4 juin 2023.) (FRANCOIS DEVOS / HANS LUCAS)

En Pologne, l’Union européenne est redevenue l’une des priorités du gouvernement en place, alors que les élections européennes auront lieu du 6 au 9 juin prochain. Après huit années de pouvoir du PiS, parti ultraconservateur et surtout anti-européen, le cap a radicalement changé en octobre. La coalition dite démocratique a pris le pouvoir et met un accent sur les relations avec Bruxelles.  

Les Polonais n’ont pas hésité à voter pour Donald Tusk, leader de la nouvelle coalition au pouvoir. Un pro-européen convaincu, ancien président du Conseil de l’Europe. Lors de sa campagne électorale, une grande partie de son discours appelait à la reprise d’une relation saine avec Bruxelles. Il promet un retour aux valeurs fondamentales de l’Union européenne notamment au niveau médiatique et judiciaire.
Parce qu’il ne faut pas oublier que les relations entre la Pologne et Bruxelles étaient particulièrement tendues avec l’ancien gouvernement. Pendant huit ans, les conservateurs du PiS se sont souvent opposés à toutes les décisions européennes, un peu comme leurs alliés Hongrois.

Le PiS toujours très implanté

Le PiS avait d’ailleurs été sanctionné par l’UE pour ses réformes judiciaires et près de 60 milliards d’euros de fonds de relance européen post-covid sont encore bloqués. Beaucoup de Polonais espèrent qu’avec le gouvernement, les fonds pourront être débloqués.

Les dernières élections législatives ont aussi montré que le PiS avait encore pas mal de poids. Ils sont nombreux à avoir voté pour cette formation politique malgré la perte de la majorité au parlement. Le parti ultraconservateur est celui qui a reçu le plus de voix lors des élections d’octobre. Mais comme les partis d’opposition ont décidé de s’unir, le PiS n’a pas remporté ces élections. Mais c’est vrai qu’avec 35% des voix, le parti garde une place très importante dans l’opposition maintenant. On devrait donc rapidement voir les thèmes de l’immigration et de la souveraineté s’imposer dans le débat lors des élections européennes.

Ces huit dernières années, ce parti a remis en cause la gestion des flux migratoires par Bruxelles. Récemment il a d’ailleurs rejeté fermement le nouveau pacte migratoire européen, l’accusant d’imposer la venue de réfugiés à la Pologne. Ses dirigeants continueront donc d’agiter le drapeau de la perte de souveraineté de la Pologne. Varsovie serait soumise à l’Union européenne, qui lui imposerait des lois défavorables, comme, par exemple, sur la transition énergétique et la fin du charbon. Le nouveau camp au pouvoir devra donc combattre ces idées qui se sont fortement imposées dans le débat public ces huit dernières années. 

La Pologne soutient l’Ukraine sans ambiguïté contre l’invasion russe et le fera encore avec Donald Tusk au pouvoir. Concernant son souhait d'intégrer l'Europe, la Pologne va vouloir discuter parce que depuis le début de la guerre, les relations entre Varsovie et Kiev ont connu quelques petites turbulences. Les routiers polonais protestent d’ailleurs en décembre et depuis près de deux mois contre la suppression des droits de douane pour les chauffeurs ukrainiens. Ils entrent plus facilement en Europe et les Polonais s’inquiètent des conditions de concurrence, parce que leurs voisins sont payés moins cher et que  le coût d’entretien des camions est aussi plus économique.

Plutôt dans l’année, ce sont les agriculteurs qui avaient manifesté contre l’importation des céréales ukrainiennes qui avait fait baisser les prix pour les locaux. Encore une fois ils avaient critiqué les importations ukrainiennes, car elles se vendaient moins cher et n’étaient pas soumises aux mêmes normes européennes. Le débat autour de l'adhésion de l’Ukraine à l'Union européenne devrait donc toucher les Polonais qui font face à ces changements de manière concrète.

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