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Le chasseur de trous noirs est de retour

Après trois ans de mise à niveau, le détecteur Ligo recommence à capter les vagues de l’espace-temps et à détecter les fusions de trous noirs. De quoi comprendre la genèse des monstres du cosmos. Et même peut-être détecter les petits trous noirs, les trous noirs primordiaux, qui n’existent pour l’instant que sur le papier.
Article rédigé par franceinfo - Mathilde Fontez
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Image du massif super trou noir M87, tel qu'il fut photographié en 2019 par le EHT, l'Event Horizon Télescope à gauche, et la nouvelle génération d'image utilisant l'algorithme PRIMO, à droite le 13 avril 2023. (HANDOUT / LIA MEDEIROS, INSTITUTE FOR ADVA / AFP)

Mathilde Fontez, rédactrice en chef du magazine scientifique Epsiloon, nous parle aujourd’hui d'un grand instrument de science qui vient de reprendre du service, le détecteur d’ondes gravitationnelles Ligo.

franceinfo : Ce détecteur Ligo est celui qui a permis de voir, pour la première fois en 2015, des fusions de trous noirs ?

Mathilde Fontez : Oui, c’est un télescope qui ne fait pas de belles images. Il peut produire des sons : ça fait quel son, deux trous noirs qui entrent en collision ? Ça fait ça : pas très impressionnant, comparé à la violence de l’événement. On écoute là, l’un des plus gros cataclysmes de l’univers. Le choc de deux monstres, des trous noirs donc, des astres très massifs, des dizaines de fois plus massifs que notre étoile, le Soleil, mais qui sont concentrés dans un volume beaucoup plus petit : des astres ultra-denses, si denses, qu’ils attirent tout ce qui passe près d’eux, et ne le laissent pas ressortir.

Alors pour capter leur présence, les astrophysiciens ont eu l’idée d’essayer de capter les vibrations qu’ils causent dans l’espace-temps lorsqu’ils fusionnent : la théorie prédisait qu’ils doivent faire vibrer la trame de l’univers elle-même. Ça ressemble à de la SF, mais c’est tout ce qu’il y a de plus sérieux. Les premières de ces ondes gravitationnelles ont été découvertes en 2015.

Deux étoiles à neutrons en collision créent une onde gravitationnelle qui se propage sur le tissu de l'espace-temps. Des ondes gravitationnelles ont été détectées par les télescopes LIGO et Virgo, le 17 août 2017. (Image d'artiste) (DON DIXON / LEEMAGE VIA AFP)

Et là, le détecteur d’ondes gravitationnelles reprend une nouvelle campagne d’observation ?

Oui, entre 2015 et 2020, il a détecté 90 "événements", c’est comme ça que les astrophysiciens les appellent. 90 fusions de trous noirs, et aussi des fusions d’étoiles à neutrons – des étoiles ultra-denses, mais moins que les trous noirs. Ils ont aussi vu des fusions de trous noirs ET d’étoiles à neutrons. Bref, ils ont commencé à dresser un bestiaire de ces monstres cosmiques. Avec deux détecteurs : Ligo, aux Etats-Unis puis Virgo, en Italie.

Mais il restait du bruit de fond qui perturbait les observations. Les détecteurs ont été arrêtés pour réduire ce bruit de fond. Cela consiste à allonger les tunnels dans lesquels circule le faisceau laser qui permet de capter cette infime vibration d’espace-temps – ces tunnels font plusieurs kilomètres, ils sont capables de mettre en évidence un décalage plus petit qu’une particule, plus petit qu’un proton. Et ça y est : Ligo vient de reprendre du service. Et Virgo devrait repartir en chasse à la fin de l’été, ou à l’automne.

On va donc de nouveau "voir" des trous noirs ? 

Oui, et à un rythme effréné. Ligo devrait capter des signaux tous les deux – trois jours grâce à cette montée en précision. De quoi étudier les monstres, comprendre comment ils se forment. Et même peut-être en découvrir d’un nouveau genre, des trous noirs, plus petits par exemple, des trous noirs primordiaux, qui se seraient formés au tout début de l’univers.

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