Le castor protège les écosystèmes du réchauffement climatique
Supercastor ! Plusieurs travaux récents montrent l’énorme apport du castor comme allié dans la lutte contre les sécheresses, les inondations, et pour rebooster la biodiversité. Mathilde Fontez, rédactrice en chef du magazine scientifique Epsiloon nous parle aujourd'hui de ce rongeur qui construit des barrages sur les rivières.
franceinfo : Les climatologues, les spécialistes de la biodiversité s’intéressent au castor ?
Mathilde Fontez : Oui, même si on n’en a pas forcément vu à l’œuvre, on connaît tous ces barrages que le castor construit, pour immerger l’entrée de sa hutte, et se protéger contre les prédateurs. Cet animal d’une vingtaine de kilos est un bâtisseur frénétique, il construit un barrage en une semaine. Et c’est l’impact de ces barrages sur les écosystèmes que les chercheurs sont en train de découvrir.
Au point que certains considèrent le castor comme l’espèce la plus influente dans notre environnement : la seule capable de transformer un paysage profondément, pour le rendre plus résistant à la sécheresse, aux inondations…
En France, c’est une espèce protégée ?
Oui, et depuis longtemps : 1909, c’est le premier mammifère à avoir été protégé. On compte 25.000 castors en France actuellement – il est interdit de détruire leur barrage, vous risquez une amende de 150.000 euros.
Mais globalement, l’animal a frôlé l’extinction au XXe siècle, il était chassé pour sa peau, pour sa viande. Et on a mis du temps à prendre conscience de son importance pour les écosystèmes. Alors que disent les études aujourd’hui ? D’abord, que le castor protège la biodiversité : les réseaux d’eau qu’ils créent favorisent la présence d’organismes aquatiques, de papillons, d’insectes, d’oiseaux. On a mesuré localement qu’ils multiplient par trois la diversité des amphibiens, par exemple.
Les études montrent aussi que les castors adoucissent les canicules. Ils créent des poches d’eau froide, ils rafraîchissent l’atmosphère par évaporation. Des chercheurs américains ont relevé un refroidissement local de 2,3°C de l’eau, durant l’été. Ils empêchent les inondations, en ralentissant l’écoulement de l’eau. Ils bloquent les incendies en imbibant les sols et les plantes alentour : une étude a montré aux États-Unis que les zones avec des castors subissent trois fois moins de pertes de végétation lors des grands feux.
Ils créent une sorte de zone humide locale ?
C’est exactement ça. Ils ont même un impact sur la filtration de l’eau : leurs constructions accumulent les sédiments et retiennent les polluants. L’eau qui sort de leurs barrages contient cinq fois moins de phosphates, et moins 70% de nitrates – les polluants de l’agriculture intensive.
Alors, ça n’est pas toujours facile de vivre avec les castors : il faut protéger les cultures d’arbres et de fruits autour d’eux. Mais on commence à les appeler à l’aide. L’Écosse, l’Angleterre, l’Allemagne, la Californie misent officiellement sur lui. Tout le monde est en train de succomber au pouvoir de supercastor…
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