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Les nouveaux défis de Manuel Valls

La mise en garde mortifère de Manuel Valls ce week-end va bien au-delà d’une gauche à bout de souffle. Le Premier ministre a non seulement mis en garde sa famille politique, mais a également dressé en creux le portrait d'un pays qui entrera dans un cycle de défiance s'il ne se relève pas.
Article rédigé par Jean-François Achilli
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
  (© RF)

Non, Manuel Valls n’a pas "dramatisé" la situation samedi devant le Conseil national du PS, en évoquant cette gauche "menacée de mort" : son appel du 14 juin semblait bien plus ancré dans le réel que son discours de politique générale devant l’Assemblée il y a deux mois. Parce qu’en l’absence durable de résultats concrets, la situation du pays pourrait vite s’aggraver, et pas seulement pour la famille socialiste.

En témoigne la persistance des conflits sociaux : la gauche au pouvoir n’a pu produire qu’un dialogue de sourds avec des cheminots et des intermittents censés voter pour elle. Les réformes qui arrivent devant le Parlement sont autant de sujets de crispation, voire de blocage : budget rectificatif,  financement de la sécu, redécoupage des régions, l’opposition gangrène les rangs du PS. Attention au risque de "sécession" prévient le premier secrétaire Jean-Christophe Cambadélis. Le discours de fermeté des dirigeants de la majorité semble, pour l’heure, inefficace. 

Manuel Valls veut faire plier les frondeurs 

Le Premier ministre ne les a pas menacés de mort, jurait hier son entourage, mais a fait part de son hostilité à une "reparlementarisation à outrance des institutions", synonyme de frein, et au fond contraire à l’esprit de la Vème République. Pour Manuel Valls, la gauche, qui depuis trente ans n’a gouverné qu’en pointillés ou en régime de cohabitation, n’a jamais eu le temps de mener à bien les réformes de structures nécessaires. Nous sommes, selon lui, dans "un moment de vérité": si le pays ne se relève pas, alors nous entrerons dans un cycle de défiance encore plus fort. Et au bout du voyage, la gauche sera éliminée de la compétition en 2017. Avec une Marine le Pen au second tour. 

 

La dramatisation de Manuel Valls laisse les mutins de marbre, ils ne veulent rien entendre et semblent bien au contraire déterminés à amender le budget en séance, en dehors du groupe PS, même si le Premier ministre dispose de l’arme nucléaire parlementaire, le 49.3. Le problème est que certains frondeurs ont déjà pris langue avec le Parti communiste de Pierre Laurent et les Verts de l’ancienne ministre Cécile Duflot, avec la tentation de retrouver les charmes d’une union de la gauche d’un autre temps. 

Le mal est plus profond 

Il va bien au-delà de cette poignée de parlementaires socialistes hostiles : il ne suffit pas de leur dire qu’ils sont irresponsables. Mieux vaudrait comprendre les racines du mal. Quand François Hollande fait du Maurice Thorez en déclarant à propos de la grève SNCF "il faut savoir arrêter un mouvement ", personne n’y prête attention. Le pays tout entier semble rétif à l’autorité, à la réforme, il a tourné le dos à la politique, et ne croit plus en des lendemains meilleurs. C’est là le défi le plus puissant pour Manuel Valls.

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