Hollande, de la Françafrique à la Centrafrique
De la Françafrique à la Centrafrique, il n'y a qu'un pas que François Hollande
a franchi, comme au Mali, sans hésiter un instant.
C'est une évidence, nous restons le gendarme de l'Afrique francophone, mais l'esprit n'est heureusement
plus le même. Et
cette réflexion prend toute son acuité au moment où le monde entier rend
hommage à Nelson Mandela.
Tous les présidents de la Vème République ont
cherché à conserver une influence déterminante dans nos anciennes colonies africaines. De manière volontaire, comme jadis
Charles de Gaulle, avec les réseaux Foccart, pour y défendre les intérêts de la
France dans cet immense pré carré dont le sous sol regorge de richesses, ce qui
est le cas en République centrafricaine. Valery Giscard d'Estaing y entretenait
des relations amicales avec le président Bokassa, jusqu'à son absurde sacre en
tant qu'empereur en 77. VGE subira le revers de l'affaire des diamants.
François Mitterrand a gardé la main, en installant à la tête de la cellule africaine de l'Elysée son fils Jean-Christophe,
surnommé " Papamadit ", tout un programme.
La
page a-t-elle réellement été tournée en 2007 ?
Nicolas Sarkozy s'est inscrit en rupture avec
cette Françafrique qui a perduré sous Chirac, en dénonçant à
Cotonou, un an avant son élection, les "réseaux d'un autre temps"
et en promettant une ère nouvelle dans les relations. Le règne des
intermédiaires a pourtant perduré. Nicolas Sarkozy n'avait aucune empathie
envers le continent africain. Ce qui ne l'a pas empêché d'intervenir
contre Laurent Gbagbo en Côte d'Ivoire, et de mener une guerre totale contre le
colonel Kadhafi en Lybie. François Hollande s'inscrit dans cette nouvelle
génération de présidents nés après la deuxième guerre mondiale, qui abordent la
question africaine de manière plus pragmatique. Nous
sommes passés de l'ère paternaliste du post-colonisateur à celle économique du
protecteur.
La
relation n'est réellement plus sur les mêmes bases ?
François Hollande ne connaissait rien du
continent africain et n'avait aucun préjugé : confronté à l'urgence, il a été obligé d'y aller.
La France entretient aujourd'hui une relation décomplexée avec ces nouveaux
dirigeants africains, conviés aujourd'hui au sommet de
l'Elysée, qui ont été formés pour certains dans les meilleures universités et
sont déjà entrés dans l'Histoire, faisant mentir le discours de Dakar. Prenez
Alassane Ouattara : celui qui a fait appel à l'armée française pour récupérer son fauteuil de président
de la Côte d'Ivoire a été l'un des dirigeants du FMI. Le contexte international
a lui aussi évolué : les Etats-Unis ne veulent plus de nouveau front militaire, délèguent bien volontiers à
Paris.
François
Hollande, comme pour le Mali, a agi sans hésiter.
C'est
étonnant, il se comporte en chef de guerre sans faille. C'est un rôle régalien
qu'il affectionne, il est obsédé par la souveraineté de la France, explique un
proche : dans ces moments-là, il n'y a pas de conseil constitutionnel, pas
d'Union européenne, pas de Front Monétaire international, le chef de l'Etat
devant son conseil de défense décide seul d'engager la force. Et montre une
surprenante détermination. Ce n'est pas le moindre des paradoxes : celui
que ses détracteurs traitent d'indécis, de mou du sérail, s'est transformé en
super gendarme musclé de l'Afrique.
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