Plan pour les Ehpad : "Un nouveau petit pas", selon Romain Gizolme (AD-PA)
Le directeur de l’Association des directeurs au service des personnes âgées (AD-PA), Romain Gizolme, a expliqué, mercredi sur franceinfo, que les mesures concernant la dépendance et les Ehpad ne sont pas suffisantes.
La ministre de la santé Agnès Buzyn a présenté, mercredi 30 mai, son plan pour les Ehpad. Les plus de 85 ans sont 1,5 millions aujourd'hui, ils seront près de 5 millions en 2050. Quelque 360 millions d'euros de crédits de 2019 à 2021, soit 143 millions de plus que prévu seront consacrés au recrutement de personnels soignants. 36 millions d'euros seront consacrés par ailleurs pour la présence d'infirmiers la nuit, afin de réduire les hospitalisations en urgence évitable. Romain Gizolme, le directeur de l'Association des directeurs au service des personnes âgées (AD-AP) était l'invité de "L'interview éco" mercredi soir sur franceinfo.
franceinfo : Il y a plus de 7 500 Ehpad en France, plus de 600 000 résidents. Avec ces mesures, est-ce que les personnes âgées vont-être mieux traitées ?
Romain Gizolme : Ce qu’il y a d’intéressant dans les annonces de la ministre de la santé, c’est les perspectives qu’elles portent. Des perspectives à moyen et long termes qui visent à repenser la place des personnes âgées dans la société, à repenser les services et l’aide qu’on leur apporte et repenser un financement qui permet de répondre à leur besoin et à leurs attentes, en établissement et à domicile. Pour les mesures plus concrètes, c’est un début, un nouveau petit pas. Nous espérons que cela ira un peu plus loin.
Ce n’est pas ce que vous attendiez ?
Clairement pas. On nous annonce 143 millions d’euros supplémentaires. Evidemment ça paraît beaucoup mais 143 millions d’euros supplémentaires sur trois ans, si vous le rapportez au nombre d’établissements, ça ne représente que 1 500 postes supplémentaires pour 7 500 établissements. Donc, on voit bien que cela ne va pas apporter le changement en termes de qualité d’accompagnement pour les personnes âgées, ni apporter plus de soutien aux proches et aux familles ou encore améliorer les conditions de travail des professionnels.
Qu’allez-vous faire de cet argent ?
Nous allons faire quelques embauches qui permettront d’un peu améliorer la situation mais ces financements-là ne permettront pas par exemple de compenser la suppression des contrats aidés. Donc cela ne changera pas la situation des personnes âgées, des familles et des professionnels. C’est en cela que les perspectives que l’État ouvre nous paraissent plus intéressantes et notamment avec l’engagement qu’a pris Emmanuel Macron de réfléchir à un projet de financement nouveau, l’aide aux personnes âgées dans son ensemble, donc en établissement et à domicile, avec un calendrier assez resserré puisqu’il a envisagé ça pour fin 2018, début 2019. C’est extrêmement intéressant, d’autant que les organisations de professionnels mais aussi de retraités, de personnes âgées ou de familles attendent cette grande réforme. La création de ce que certains appellent un cinquième risque que nous préférons appeler une prestation autonomique qui permettra réellement d’augmenter le temps de présence auprès des personnes âgées et de réduire les coûts pour les personnes âgées et les familles.
Les personnels des Ehpad ont manifesté et exprimé un grand désarroi ces derniers mois. Est-ce que le climat s’améliore du côté du personnel ?
Il va falloir effectivement créer les conditions d’une amélioration des conditions de travail mais aussi d’accompagnement des personnes âgées et du soutien aux familles. Cela va passer par une réforme profonde de notre modèle de protection sociale pour les personnes âgées et puis des réponses en termes de service. Aujourd’hui, il est clair qu’il faut envisager le développement de structures alternatives qui répondraient mieux aux attentes des personnes âgées. L’Etat dit qu’il va réfléchir à ces questions donc on voit bien qu’il faut engager un grand chantier, c’est en cela que les annonces de la ministre de la santé, Agnès Buzyn sont intéressantes parce qu’elles prévoient visiblement d’engager ce grand chantier et cette réflexion de société.
La dépendance va couter de plus en plus cher. Aujourd’hui, plus d’un million et demi de personnes de plus de 85 ans sont pris en charge. Qui financera la dépendance ?
Il y a différentes pistes de financement qui peuvent être envisagées. En 2011, le Conseil économique social et environnemental s’était penché sur la question et l’ensemble des organisations, à la fois d’employeurs et de salariés avaient trouvé une piste de financement qui était acceptée par la société civile. Il y a la deuxième journée de solidarité qui ne fait pas l’unanimité mais on voit bien qu’il peut y avoir différentes pistes de financement. Soit on paye collectivement, soit on paye individuellement, ça c’est un choix de société. Mais aujourd’hui, l’ensemble des français trouve déjà payer trop cher pour l’accompagnement de leurs parents. Aujourd’hui, nous demandons à des personnes âgées, à des familles, d’assumer plus de 60% du prix de journée du coût de fonctionnement d’un établissement, on n’assume pas autant pour un séjour hospitalier ou sinon personne ne se soignerait. Je pense que les français ne peuvent pas payer plus. Quand vous avez un prix moyen d’un séjour en maison de retraite qui est de l’ordre de 2 200 euros et que vous avez des pensions de retraites moyenne à 1 200 euros, ça n’est pas tenable.
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