Législatives 2024 : "On ne donne pas de consigne de vote", déclare le président de l'Union des entreprises de proximité

Le Medef a fortement critiqué les programmes économiques du Rassemblement national et du Nouveau Front populaire, mais qu'en est-il des patrons des TPE et PME ? Michel Picon, président de l'Union des entreprises de proximité, est l'invité éco de franceinfo.
Article rédigé par Camille Revel
Radio France
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Temps de lecture : 6min
Michel Picon, président de l'U2P, l'union des entreprises de proximité. (FRANCEINFO / RADIOFRANCE)

Qu'attendent les patrons des candidats aux législatives ? Le Medef a déjà dévoilé ses conclusions jugeant dangereux, pour l'économie française, les programmes du Nouveau Front populaire et du RN, mais que disent les chefs des petites entreprises ? Michel Picon, président de l'U2P, l'Union des entreprises de proximité qui représente près de 4 millions de TPE, de PME, de l'artisanat, du commerce, des professions libérales, soit les deux tiers des entreprises françaises est l'invité éco de franceinfo.

franceinfo : Vous avez reçu, avec d'autres organisations patronales, les chefs de file des grands partis. Vous en êtes ressortis avec quelle impression et dans quel état d'esprit ?

Michel Picon : On a obtenu un certain nombre de réponses aux questions que l'on avait posées. Pas forcément des réponses qui nous ont satisfaits, certaines qui nous ont laissés encore dans le doute, aussi bien des candidats du nouveau Front Populaire que des candidats du Rassemblement national. Sachant que pour les questions qui étaient posées à Bruno Le Maire, on connaissait à peu près les réponses puisqu'il s'agit d'une continuité de la politique menée avec quelques ajustements, mais qui ne sont pas de nature à nous inquiéter.

Une proposition vous a fait bondir celle de l'Alliance de gauche qui propose de faire passer le SMIC à 1 600 euros net. Le Nouveau Front populaire a un petit peu complété cette proposition, mais c'est non pour vous ?

Moi, je pense toujours aux auditeurs qui nous écoutent aujourd'hui et qui se disent, mais pourquoi ils s'opposent à cette mesure ? Parce que je mesure combien la vie doit être dure pour ceux qui sont au-dessous de cela. Mais il faut que les entreprises puissent supporter cette augmentation et d'après les informations que nous avons, ça va faire du dégât. Les précisions qui sont données aujourd'hui ne me rassurent pas. Elle propose aux entreprises de leur prêter de l'argent à taux zéro pour pouvoir faire face à cette mesure.

Le Nouveau Front populaire a chiffré son programme, reconnaissant que dans les premiers mois, certaines PME, pourraient avoir besoin d'être aidées. Donc il propose des accompagnements avec un fonds de solidarité pour le développement, pour la reprise à 0% des charges financières, des avances à 0% sur un ou deux ans par le pôle public bancaire si la situation financière est difficile et un dispositif de crédit bonifié. Tout ça, vous dites que ça ne suffira pas ?

Moi, je suis assez quand même sidéré qu'on puisse proposer des mesures dont on sait dès le départ, qu'elles ne sont pas applicables. Et on nous dit, mais pour que vous puissiez les appliquer, on va vous prêter de l'argent. On est tout de même dans un monde un peu curieux. Ce que je pense, c'est qu'il faut travailler sur les salaires, d'ailleurs, nous y avons commencé, mais il faut renvoyer ça dans les branches, secteur par secteur, là où c'est possible. On a déjà fait beaucoup de choses. Je rappelle que l'hôtellerie-restauration a augmenté les salaires de 15% l'année dernière. Quand c'est possible et quand il y a de la marge, les branches peuvent négocier dans le cadre du dialogue social et du paritarisme. Mais une augmentation brutale comme ça, applicable à tous, je pense que ce n'est pas raisonnable.

Je vais vous parler d'une autre proposition celle du RN avec Jordan Bardella, qui promet notamment des augmentations salariales exemptées de cotisations patronales jusqu'à un certain seuil et qui s'engage aussi en cas de majorité absolue à l'Assemblée, à une baisse de la TVA sur l'électricité, le gaz, le fioul et les carburants. Qu'en pensez-vous ?

Pour ce qui est d'une augmentation de salaire de 10% exonérée de cotisations sociales, je dirais que c'est un habillage, mais qui existe déjà. C'est ce qu'on a appelé la prime Macron, qui permet de verser hors cotisations sociales jusqu'à 3 000 euros. Donc, 10% dans les 3 000 euros, on y est. En ce qui concerne la baisse de la TVA d'abord, on n'est jamais certain qu'elle soit répercutée. On m'explique qu'on mettra des dispositifs, mais je ne suis pas certain qu'à la pompe, les Français la trouver parce qu'il y aura toujours une bonne raison pour que les grandes compagnies pétrolières disent que le raffinage va augmenter ou que les coûts de production ont augmenté. Moi, je suis assez sceptique. D'une manière générale, Jordan Bardella lisse, tous ceux qu'il peut contrarier et dit, "on en parlera plus tard". C'est tout de même un chèque en blanc qui est demandé.

Avec cette dissolution, il y a des projets de loi qui ont disparu et qui ne sont plus certains de réapparaître dans la prochaine législature, notamment celui sur la simplification. Ça, vous vous y teniez, à ce texte ?

Nous avions fait 130 propositions de simplification pour décorseter l'activité des petites entreprises et lever de la charge qui leur bouffe du temps. Ce dossier est prêt, il est en examen au Sénat et on n'a pas de garantie que ce travail va être repris, à l'exception bien évidemment de la majorité sortante. Les entreprises, elles ont besoin de continuité et de lisibilité. Ce n'est pas parce que ce sont les autres qui l'ont fait que ce n'est pas bon. Il faut être un peu plus pragmatique, nous semble-t-il.

Vous avez envoyé des questionnaires aux formations pour savoir ce que pensent les candidats de tel ou tel sujet ?

Nous avons envoyé 21 priorités et nous avons posé 15 questions extrêmement précises sur plein de sujets qui sont très importants. On n'a pas encore de réponses, mais les réponses devraient nous parvenir lundi ou mardi. Nous les transmettrons à l'ensemble des médias et à tous nos adhérents et ensuite nous n'avons pas de consigne de vote. Nous ne sommes pas un parti politique. Moi, le mandat que j'ai, c'est de défendre les intérêts des petites entreprises. Et ce mandat ne m'amène pas à pouvoir dire où est le bien, où est le mal. Chacun choisira. Le travail de l'U2P, c'est d'éclairer ce choix.

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