Boris Picano-Nacci, un nouveau trader devant la justice
Boris Picano-Nacci va être jugé pour "abus de confiance". Il risque trois ans de prison et 375.000 euros d'amende. Il est soupçonné d'avoir pris trop de risques avec l'argent de la banque. C'était en 2008.
Dans Les Echos, Valérie de Senneville nous replonge en octobre 2008. Un mois avant, la banque Lehman Brothers a fait faillite. Les marchés sont en déroute. Encore dix mois avant, la Société Générale a découvert la perte colossale laissée par Jérôme Kerviel. Aux sièges des banques, la tension est vive, en particulier aux Caisses d'Epargne, qui sont en plein rapprochement avec les Banques Populaires. Dans l'opinion, L'Ecureuil a l'image d'une banque tranquille, d'un gestionnaire raisonnable. Pourtant elle a développé, elle aussi, une activité spéculative. Elle possède un service "trading pour compte propre". Comme d'autres établissements, elle emploie de jeunes traders chargés de gagner beaucoup d'argent en très peu de temps.
Mais en cette année 2008, le ciel de la finance s'assombrit. Au mois d'avril, la banque décide de fermer son activité de trading pour compte propre. Les traders ont pour mission de liquider leurs positions avant la fin de l'année, et d'éviter tout nouveau risque. Boris Picano-Nacci est le premier concerné. Il a 33 ans. Depuis 2006, il est responsable du portefeuille dérivés-actions.
Que fait-il, à ce moment là ? Au minimum, de mauvais choix. C'est ce qu'il admet aujourd'hui. Mais d'après la banque, Boris Picano-Nacci va trop loin, il viole son mandat de gestion. L'avocat des Caisses d'Epargne, Jean Reinhart, décrit dans le journal Les Echos un trader dépassé les événements. Selon lui, le jeune homme "prend peur et monte une activité parallèle où il va essayer de se 'refaire'. Mais la machine s'emballe, jusqu'à perdre 115 millions d'euros le 1er octobre. Boris Picano-Nacci joue une martingale".
Une chose est sure : le 10 octobre, le trader a conscience de la situation. Il alerte sa direction. Le 24 octobre, la banque chiffre ses pertes à 751 millions d'euros. Elle porte plainte. Le 30 octobre, l'employé est mis en examen. L'enquête écarte toute "intention malveillante" mais retient quand même l'abus de confiance. Les Caisses d'épargne, de leur côté, revoient à la baisse leur estimation. Oui, Boris Picano-Nacci est soupçonné d'avoir fait perdre à l'établissement 751 millions d'euros. Mais selon la banque, on peut lui reprocher seulement une partie de cette perte : 315 millions d'euros. Cette perte là serait due à son attitude.
Et la responsabilité de la banque ? Dès 2008, le patron des Caisses d'épargne, Charles Milhaud, doit démissionner, sous la pression de l'Elysée. L'enquête a montré que les systèmes de contrôle étaient insuffisants. La Commission bancaire a infligé aux Caisses d'épargne une amende de 20 millions d'euros, mais cette amende a été annulée, pour des raisons de forme. A partir d'aujourd'hui, devant le tribunal correctionnel de Paris, Boris Picano-Nacci va plaider la bonne foi. Il va expliquer que toutes ses opérations étaient enregistrées et parfaitement visibles. Autrement dit, que tout le monde savait.
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