L’architecte pakistanaise Yasmeen Lari reçoit la médaille d’or de l’Institut Royal Britannique pour ses maisons écologiques à 100 euros
À 82 ans, cette figure de l’architecture se consacre depuis plus de vingt ans à la construction d’habitat pour les plus défavorisés, notamment les victimes de catastrophes naturelles qui se retrouvent sans abri. Des constructions faites avec des matériaux locaux, sans importations.
C’est un peu l’équivalent d’un Nobel. L’Institut Royal d’Architecture du Royaume-Uni (Riba) remet sa médaille d’or royale à Yasmeen Lari, première femme à ouvrir un cabinet d’architecte au Pakistan en 1964 et mondialement reconnu aujourd’hui pour ses réalisations en faveur des plus pauvres.
À 82 ans, Yasmeen Lari a eu plusieurs vies. Une première de très bonne élève, où elle a appliqué tous les codes de l’architecture internationale de la deuxième partie du vingtième siècle, du béton, du verre, du métal, des gratte-ciels toujours plus grand, toujours plus clinquants, des sièges d’entreprises, des hôtels, des "mammouths", dit-elle, disproportionnés, "bourrés d’ego" et qu’elle a décidé de ne plus construire.
En l’an 2000, elle a entamé sa deuxième vie, pris sa retraite, fermé son cabinet de design et s’est consacré uniquement à la construction sociale, d’urgence, pour les plus défavorisés. Elle a conceptualisé la maison économe, peu chère, faite avec des matériaux locaux, durables, recyclables et assemblables en quelques heures seulement avec des techniques de maçonnerie très simples. Des maisons qui ne coûtent que 100 euros, qui peuvent accueillir six à sept personnes, "et surtout qui sont belles !, dit-elle à CNN, parce qu’il n’y a pas que l’élite qui a droit au beau."
Construire un million de maisons
En 2005, lorsque le Pakistan a enduré un tremblement de terre qui a tué 86 000 personnes, elle a mis la main à la pâte pour reloger les familles dont les maisons se sont effondrées. Même chose avec le séisme de 2015. Plus récemment, c’est pour réparer les dégâts causés par la grande inondation qui a noyé le pays l’été dernier qu’elle se démène avec sa fondation. Objectif : construire un million de maisons pour un million de familles sans abri depuis que l’eau et la boue ont tout emporté. Un million de maisons, rondes, sur pilotis, faites de terre, de paille, de bambou et de chaux. Tout ce qui est à portée de main et qui n’a pas besoin d’être importé.
Un million ça parait énorme, mais elle confie au Guardian qu’elle va y arriver, que de toute façon l’urgence climatique fait qu’il n’y a pas le choix, qu’il faut changer de méthode, et c’est cette vision de l’architecture que récompense la médaille d’or de l’architecture, "une véritable révolution, dit même le Royal Institute dans son communiqué, pour lutter contre les inégalités, et changer des vies pour le mieux".
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