Iran : sur Instagram, Elaheh Tavokolian, étudiante blessée lors des manifestations, raconte son calvaire et sa détermination
Un policier l’a éborgnée lors d’une manifestation à l’automne dans le nord-est de l'Iran. Depuis, elle a perdu la vue, et la balle qui était toujours fichée dans son crâne vient tout juste de lui être retirée lors d’une opération en Italie. Un projectile qu’elle rêve maintenant de brandir devant une cour internationale.
En octobre dernier, Elaheh Tavokolian, doctorante en commerce international, a bien cru mourir, comme c’est arrivé à nombre d’autres jeunes iraniens qui ont osé manifester pour rendre hommage à Mahsa Amini, cette femme tabassée en septembre par la police des mœurs pour une mèche de cheveux dépassant de son voile. Elaheh Tavokolian a essuyé les tirs des forces de l’ordre et une balle s’est logée dans son œil droit. C’était lors d’une manifestation dans la ville de Mashhad, dans le nord de l’Iran.
Les vidéos prises par des manifestants la montrent s’effondrant de douleur avant d’être évacuée. Le lendemain, elle s’est réveillée en ayant perdu la vue côté droit, mais en ayant gagné une détermination qui ne l’a plus quittée depuis.
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"Illustrer ce que le régime iranien fait à sa jeunesse"
Elaheh Tavokolian a décidé de faire du bruit, beaucoup de bruit, de se montrer, éborgnée, sur les réseaux sociaux, notamment son compte Instagram, "pour illustrer, dit-elle, ce que le régime iranien fait à sa jeunesse". Ces derniers mois, elle a raconté son parcours médical dans le détail, la cornée et la rétine endommagés, la perte définitive de la vision, et puis cette douleur terrible dans la tête, le projectile qui l’a touchée étant toujours logé dans son crâne. À force de messages, son combat a attiré l’attention d’une journaliste italienne, Roberta Rei, qui lui a proposé de venir en Italie pour se faire opérer.
Une cagnotte a donc été ouverte pour lui permettre de faire le voyage et il y a un mois, Elaheh est arrivée à Milan. La balle a été retirée il y a dix jours, elle doit maintenant partir pour Rome pour la dernière étape : enlever le bandeau en forme de cœur qu’elle porte côté droit et faire poser à la place un œil de verre. "J’ai mal, écrit-elle au lendemain de l’opération, mais je ne regrette rien, je ne regrette sûrement pas d’avoir perdu la vue parce que, finalement, ça permet au monde de voir ce qu’il se passe en Iran, et c’est pour ça que je veux vivre désormais, pour continuer à raconter ce qui se passe".
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Elaheh Tavokolian explique qu’elle veut parler pour les centaines de jeunes éborgnés dans les manifestations ces six derniers mois, pour les 20 000 personnes arrêtées, les 500 tuées, selon les chiffres les plus bas. Elle précise aussi qu’elle a gardé la balle, "pour pouvoir la brandir devant une cour de justice internationale", dit-elle à la BBC. "L’espoir des jours meilleurs ne cessera jamais de battre en moi".
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