Édito
Législatives 2024 : Jordan Bardella peut-il vraiment refuser Matignon si le RN n'obtient qu'une majorité relative ?

Le Rassemblement national aborde la dernière ligne droite des élections législatives en tête des sondages. Jordan Bardella a déjà prévenu qu'il souhaitait devenir Premier ministre uniquement s'il disposait au soir du second tour d'une majorité absolue de députés à l'Assemblée nationale.
Article rédigé par Renaud Dély
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Jordan Bardella lors d'une audition organisée par le MEDEF pour présenter aux entrepreneurs français le programme politique des partis aux prochaines élections législatives, à Paris, le 20 juin 2024. (VINCENT ISORE / MAXPPP)

À moins une semaine du premier tour des législatives, dimanche Matignon semble à portée de mains pour le Rassemblement national. Mais Jordan Bardella n’ira pas à n’importe quelles conditions. Il l’a répété dimanche  23 juin dans un entretien au Journal du dimanche. Pas question d’accepter le poste de Premier ministre s’il n’a qu’une majorité relative. Le président du parti d’extrême droite pose ses exigences. Il réclame une majorité absolue, soit au moins 289 députés. C’est ça ou rien. Il ne veut pas prendre le risque de se brûler les ailes et de se retrouver à la merci d’une motion de censure. Pour Jordan Bardella, au moment d’entrer à Matignon, c’est ceinture et bretelles ! 
 
Si Emmanuel Macron l’appelle, peut-il refuser le poste ? D’un point de vue institutionnel oui, bien sûr. Tout le monde peut refuser d’être nommé, même avec une majorité absolue, d’ailleurs. Mais politiquement, ce serait très compliqué à expliquer aux électeurs du RN. Privés de majorité absolue, ni Élisabeth Borne en juin 2022, ni Gabriel Attal en janvier 2023, n’ont refusé d’aller à Matignon. Ils se sont heurtés à de nombreuses difficultés, ont dû surmonter une bonne vingtaine de motions de censure, mais ils ont réussi à gouverner et même à faire passer des textes très clivants comme la réforme des retraites ou la loi immigration.

"Refus d'obstacles" ou coup tactique 

Les militants lepénistes rêvent de prendre le pouvoir depuis la création du Front National, il y a 52 ans ! Depuis 1972, l’un des slogans phares de l’extrême droite, c’est "Le Pen vite !". Et au hop, au moment où le RN serait enfin appelé aux affaires, son chef se défilerait. Ce "refus d’obstacles", selon l’expression de Gabriel Attal, pourrait avoir de lourdes conséquences électorales. En fait, le RN aurait du mal à se planquer, Jordan Bardella le sait, alors il bluffe pour deux raisons.  
 
Cette technique lui permet de mettre la pression sur Emmanuel Macron. Coup sur coup Marine Le Pen et Jordan Bardella viennent d’évoquer la démission du chef de l’État. Oh, ils ne la réclament pas, pas encore en tout cas, mais ils appellent le Président à s’interroger en cas de blocage. Une façon, mine de rien, de mettre le sujet dans le débat public, au risque de donner l’impression, déjà, d’esquisser un semblant de coup de force. L’autre raison, c’est une tactique plus classique. En agitant une menace de paralysie en cas de majorité relative, Jordan Bardella cherche à mobiliser ses électeurs pour obtenir une majorité absolue, un objectif atteignable pour le parti d’extrême droite au vu de sa dynamique actuelle.

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