Jean-François Copé et le danger de lepénisation
Briser des tabous. Affirmer des vérités que le reste du personnel
politique n'ose pas dire, tel est le crédo de Jean-François Copé. Le candidat à
la présidence de l'UMP prône une droite décomplexée. Et il met le doigt sur les
pudeurs de ses détracteurs, choqués par le terme de "racisme anti-blanc"
ou par cette dénonciation des bandes se revendiquant d'un islam
intolérant, qui arrachent le pain au chocolat de la bouche du collégien
français.
L'image rappelle celle de Jean-Marie Le Pen dénonçant, à la fin
des années 80, les étrangers qui prenaient le pain de la bouche des français. Cette
comparaison agace Jean-François Copé. Ce n'est pas parce qu'il dit la vérité
qu'il pratique le lepénisme.
Mais cette critique est insistante à son propos, ces derniers
temps.
Car il y a bien un danger de lepénisme dans la posture de
Jean-François Copé, par son positionnement politique même. Briser les tabous,
dire les choses au lieu de les taire, comme le revendique le maire de Meaux,
c'est prendre la même posture que le président du Front National. "Je dis tout haut ce que les Français pensent tout bas" se vantait Jean-Marie Le Pen dans les
années 80. D'une certaine façon, Jean-François Copé revendique la même
attitude, en formulant sur la scène publique, ce que les français subissent, en
silence, dans certains quartiers. Il se fait leur porte voix, comme le Front
National, de Marine Le Pen aujourd'hui, se fait le porte-voix des
invisibles.
C'est un credo qui peut être porteur politiquement.
Ce credo du porte parole des oubliés, amers, de la politique a
permis l'émergence du FN sous la présidence de François Mitterrand. Les
promesses non tenues de la gauche au pouvoir ont alimenté cette rancœur. Une
rancœur qui a également permis à Marine Le Pen de rebâtir le parti de son
père mis à mal par Nicolas Sarkozy et remis en selle par les déceptions du
même sarkozysme.
Jean-François
Copé surfe donc déjà sur les déceptions du président Hollande ?
C'est là où il va peut-être un peu vite en besogne. Les déçus du
sarkozysme n'ont pas été ré-enchantés par François Hollande durant la campagne
électorale. Leurs doutes englobent tous les responsables politiques, de droite
comme de gauche. Le discrédit frappe tous les partis de gouvernement, tous ceux
qui ont été en responsabilité. Or, en adoptant cette posture, de celui qui n'a
pas peur de dire la vérité, Jean-François Copé se positionne du coté de ceux
qui ne se sont pas frottés à l'exercice du pouvoir. Ministre de Jacques Chirac,
il n'a pas siégé au sein du conseil présidé par Nicolas Sarkozy. Il peut jouer
sur cette liberté vis-à-vis des déçus de Nicolas Sarkozy, (même s'il prend soin
d'affirmer sa fidélité à l'ancien président). Il peut endosser le rôle de l'opposant
intransigeant, mais ce faisant, Jean-François Copé pourrait se heurter au
même écueil que le Front National : cantonner l'UMP au rôle de parti
protestataire. Là réside aussi le danger lepeniste.
Mais pour l'instant, au début du quinquennat de François Hollande,
le rôle de l'UMP, c'est surtout de s'opposer, non ?
C'est sans doute le calcul de Jean-François Copé. D'abord incarner
une opposition résolue, puis incarner une alternative. D'ailleurs, après avoir
dénoncé le racisme anti-blanc, Jean-François Copé propose ses solutions, dans
la lignée de son action en tant que maire de Meaux. Laurent Fabius avait jugé
que Jean Marie Le Pen posait de bonnes questions avec de mauvaises réponses. L'enjeu,
pour Jean-François Copé, c'est de poser des questions jugées bonnes, avec des
réponses à la hauteur.
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