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Édito
Au-delà des législatives, la stratégie de Marine Le Pen et du RN pour arriver à l'Élysée dans trois ans
À dix jours du premier tour, le RN est en position de force, mercredi 19 juin pour les législatives, mais Marine Le Pen a déjà un en tête la présidentielle. À ses yeux, Jordan Bardella à Matignon, ce n’est qu’une étape, presqu’un marchepied qui doit l’aider à accéder au pouvoir suprême dans trois ans. La campagne législative sert de test. Marine Le Pen cornaque de très près son jeune protégé et l’incite à repousser ou enterrer certaines promesses à l’approche du scrutin pour brouiller les cartes. Elle garde un souvenir cuisant des entre-deux tours des présidentielles 2017 et 2022, lorsque ses propositions avaient été décortiquées par les médias, et que le manque de crédibilité de son programme, en particulier économique, était apparu au grand jour.
À la tête du gouvernement, Jordan Bardella pourrait-il appliquer l’intégralité de ce programme ? Là, Marine Le Pen a un prétexte tout trouvé, qu’elle a commencé à évoquer : c’est la cohabitation qui ne permettrait pas à l’extrême droite d’agir à sa guise. D’où la nécessité de l’élire, elle, à l’Élysée dans trois ans. Un argument totalement faux. En période de cohabitation, à part en matière de défense et de politique étrangère, le président de la République n’a pas son mot à dire et un Premier ministre a les mains libres pour gouverner. Lionel Jospin l’a montré pendant cinq ans sous le mandat de Jacques Chirac. Le seul véritable obstacle à la mise en œuvre du programme du RN, c’est plutôt l’État de droit, la Constitution, qui interdit, par exemple, les mesures discriminatoires de la "préférence nationale". Mais là aussi, Marine Le Pen veut user de cet argument pour la présidentielle puisque c’est depuis l’Élysée qu’elle pourrait enclencher des révisions de la loi fondamentale.
Le perchoir, un poste stratégique
D’ici 2027, en cas de victoire du RN aux législatives Marine Le Pen veut continuer à présider le groupe des députés RN. Dans son entourage, certains l’incitent à viser le poste plus stratégique de la présidence de l’Assemblée nationale. Depuis le perchoir, Marine Le Pen pourrait affecter une posture d’arbitre, au-dessus de la mêlée d’une Assemblée bouillante, et jouir du prestige de la fonction en voyageant à l’étranger et en recevant des dignitaires internationaux. Une position confortable pour préparer la présidentielle. Certains poids lourds de la majorité pensent que si Emmanuel Macron s’est résolu à dissoudre au risque d’une cohabitation avec Jordan Bardella en 2024, c’est parce qu’il veut à tout prix éviter une passation de pouvoir avec Marine Le Pen en 2027. Il a pris le risque de s’infliger les deux.
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