Droit de vote des étrangers aux élections locales, le remake ?
Le tout, donne le sentiment d'un remake des années 80. Le candidat
François Mitterrand avait fait de cette mesure la 80è de ses 110 propositions. Le
président socialiste a accompli deux septennats sans parvenir à tenir cette
promesse. " Le pays n'est pas prêt " expliquait
François Mitterrand. Le droit de vote des étrangers aux élections locales
constitue le 50è engagement de François Hollande, sur 60. Mais il ne fait
toujours pas partie des priorités affichées par le gouvernement. Ce n'est pas
une " revendication forte " assure le ministre de
l'Intérieur Manuel Valls, dans les colonnes du Monde cet après midi.
Car l'appel de 75 députés socialistes dans le même journal a
relancé le débat.
Les écologistes emboitent le pas de ces élus socialistes. Ils
réclament l'adoption de cette loi avant l'été 2013. La gauche de la gauche en
fait une exigence. Car ce qui est en jeu, ce sont les municipales de 2014. Si
la loi est adoptée, les étrangers résidant sur le territoire national depuis
moins de 5 ans, pourront exprimer leur choix lors de ce scrutin. Mais pour
cela, encore faut-il que la loi soit adoptée. Ce qui n'est pas acquis.
Pourtant elle a été adoptée par le Sénat, à
majorité de gauche, en décembre dernier.
Oui, mais comme il s'agit de modifier la Constitution, il faut
encore que le texte soit ratifié soit par référendum, soit par une majorité des
3/5è des députés et sénateurs. Hors, l'issue d'une consultation des français
n'est pas certaine. Certes, en novembre 2011, ils s'y disaient favorables à
61%. Mais concernant les référendums, les sondages ne sont jamais très fiables.
Quant à la voie parlementaire, même si la gauche est majoritaire à l'Assemblée
nationale, et au Sénat, elle ne détient pas les 3/5è des voix.
Des incertitudes qui engagent le gouvernement à la prudence.
C'est vrai, mais ce n'est pas la seule raison. Le contexte
politique constitue également une donnée à prendre en compte. François Hollande
n'a bénéficié d'aucun état de grâce. Depuis son retour de vacances, la
dégringolade du président parait impossible à enrayer. Les sondages sont
unanimes. François Hollande donne le sentiment de mal maîtriser l'évolution de
la situation économique et sociale du pays. Même après son intervention au 20
heures de TF1, ses intentions restent imprécises aux yeux des français. Ils
doutent de sa capacité à tenir les rênes. L'Élysée craint de brouiller encore
plus le message en dispersant ses forces sur trop de sujets sociétaux, surtout
s'ils ouvrent des polémiques dangereuses.
L'appel des 75 députés socialistes ne rend pas service à François
Hollande, c'est le moins que l'on puisse dire, alors.
Disons que cet appel place François Hollande entre deux feux. D'un
coté la gauche, qui s'impatiente face à une promesse non tenue depuis 30 ans,
et qui souligne ainsi ses propres lacunes. De l'autre, la droite, persuadée que
toute l'opération est concertée et vise à favoriser le vote communautaire. Ce
qui aujourd'hui, n'est pas certain. Beaucoup d'enfants français issus de
parents immigrés se sont détournés de la gauche pour cause de promesses non
tenues. Agiter le droit de vote des étrangers sans aboutir ne peut que renforcer
leur défiance. Et l'adoption de cette disposition, dans la douleur et à contre
cœur, ne retissera pas forcément ces liens de confiance, distendus également
par la crise économique et sociale. Tant qu'il n'a aucune certitude à offrir,
François Hollande semble dans l'impasse. Pour l'instant, le droit de vote des
étrangers aux élections locales fait partie de ces incertitudes.
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