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Décentralisation : le PS sans boussole

Il n'y aura pas de grand texte sur la réforme de la décentralisation. Ainsi en a décidé cette semaine Jean-Marc Ayrault en désavouant sa ministre Marylise Lebranchu. Une volte-face révélatrice.
Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Pour François Hollande, la
semaine qui s'achève aura été dominée par la tempête de l'affaire Cahuzac, qui a
tout emporté sur son passage. Mais à quelque chose malheur est bon : du
coup, les Français ont peu entendu parler d'un autre échec important du
gouvernement : la réforme de la décentralisation.

Devant le tollé provoqué par le texte préparé par la ministre Marylise
Lebranchu, Jean-Marc Ayrault a en effet décidé de battre en retraite sur le
sujet. Le projet de loi n'est certes pas envoyé purement et simplement aux
oubliettes puisque il devrait être adopté mercredi 10 avril par le conseil des ministres, mais il va être débité en trois morceaux : d'abord, le volet
le plus novateur - la création de métropoles dans les grandes villes. Ensuite,
le chapitre consacré aux régions. Plus tard, beaucoup plus tard, le reste,
c'est-à-dire ce qui concerne les communes, les intercommunalités et les
départements.

Le gouvernement espère ainsi
morceler les oppositions et apaiser la grogne des élus locaux avant les
municipales et les sénatoriales de 2014, qui
s'annoncent déjà difficiles pour la gauche.

Mais, au-delà des faits, cet
échec est aussi révélateur d'un changement d'époque. En 1981, lorsque François Mitterrand est arrivé au pouvoir, les socialistes
avaient une pensée claire sur la décentralisation. Ils voulaient libérer les
élus locaux de l'emprise de l'Etat, créer des régions, rapprocher le pouvoir
des citoyens. On peut critiquer cette réforme dans son principe ou dans ses
modalités, mais au moins, il y avait là un projet cohérent et compréhensible.

 

Il n'y a plus rien de tel
aujourd'hui. La ministre, Marylise Lebranchu, a fait preuve de bonne volonté en
consultant beaucoup et en écoutant tout le monde. Mais justement. C'est là le
problème car chacun lui a répondu de manière corporatiste.

Les présidents de région socialistes ont défendu le pouvoir des régions.

Les présidents de département
socialistes le pouvoir des départements.

Les maires de grandes villes
socialistes le pouvoir des grandes villes.

Les maires de petites communes
socialistes celui des petites communes.

Et ainsi de suite.

Le résultat, c'est qu'en
cherchant à contenter chacun, la ministre a fini par mécontenter tout le monde.
Et que son avant-projet de loi n'avait plus vraiment de ligne directrice
claire, même s'il comprenait quelques points importants : la création des
métropoles, la désignation des régions comme chefs de file du développement
économique, le transfert de l'urbanisme des communes vers les intercommunalités
et la conception d'une décentralisation à la carte, où l'organisation aurait pu
différer d'une région à l'autre pour tenir compte de la diversité du pays.

Marylise Lebranchu, qui est
bretonne, a cru que, comme c'est souvent le cas dans sa région, ses
interlocuteurs sauraient dépasser leurs intérêts personnels pour défendre
l'intérêt général. Elle s'est visiblement trompée. Mais cet échec est
finalement moins grave pour elle que pour le PS tout entier. Car il montre que
le Parti socialiste est devenu pour l'essentiel un parti d'élus où chacun voit
midi à sa porte.

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