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Martin Boudot : "Je revendique le journalisme engagé"

Le journaliste spécialisé dans les questions d'environnement signe trois nouveaux documentaires pour la saison 2 de "Vert de Rage", diffusée dimanche soir sur France 5. Un troisième, "L'Uranium de la colère" est à retrouver sur la plate-forme France.TV.

Article rédigé par franceinfo, Matteu Maestracci
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 7 min
Le journaliste Martin Boudot, le 17 septembre 2021 sur franceinfo. (FRANCEINFO / RADIO FRANCE)

Le journaliste Martin Boudot signe trois nouveaux documentaires pour la saison 2 de Vert de Rage, une série d'enquêtes sur les grands scandales environnementaux dans le monde diffusée dimanche soir sur France 5. 

Dans le premier reportage, Engrais Maudits, il est question des engrais phosphatés, fabriqués au Maroc et utilisés dans l'agriculture, notamment en Bretagne. "On s'est rendus compte, il y a quelques années, qu'il y avait trop de cadmium [un métal du groupe zinc considéré comme toxique et écotoxique] dans les sols en France, et on a essayé de comprendre pourquoi, explique Martin Boudot. C'est un métal lourd, cancérigène. Parmi les principaux suspects, il y a les engrais phosphatés qui en contiennent. Les principales mines de phosphates sont au Maroc. On a remonté toute la filière, depuis le Maroc jusqu'à l'épandage en France." Dans chaque enquête, il y a une collaboration avec la science, précise le journaliste. 

Le concept de 'Vert de rage' est simple : ce sont des documentaires d'investigation, en collaboration avec des scientifiques, sur des problématiques environnementales.

Martin Boudot, journaliste

à franceinfo

"On a repris le chemin de contamination, depuis les mines et les usines qui les produisent. On retrouve du cadmium dans les pommes de terre, et dans le corps humain, des habitants de Bretagne nous ont autorisés à tester leurs urines. 21 % d'entre eux dépassent la concentration critique en cadmium."

Le deuxième sujet, Du charbon dans les poumons, nous emmène en Pologne, en Silésie plus particulièrement, où les usines de charbon sont responsables d'une très importante pollution de l'air. 

On a parfois l'impression que la pollution de l'air, 'l'Airmagedon' c'est en Chine, alors qu'à deux heures de Paris, en Pologne, les taux de particules dans l'air sont absolument incroyables, les villes sont parfois plus polluées qu'en Chine.

Martin Boudot

à franceinfo

"On a été alerté par des familles en Pologne, où 'Vert de rage' est diffusé. On a mis en place une étude scientifique inédite. On a travaillé avec l'université publique de Belgique et pour la première fois on a un indicateur de la pollution de l'air dans les urines. Avant on ne savait pas le faire. On a pris plusieurs enfants polonais et des enfants français de Strasbourg et on a comparé leurs taux de 'black carbone', le carbone suif qu'on retrouve près des barbecues. On a vu que les enfants polonais en ont 425 % de plus que les enfants français".

L'impact des révélations 

Dans ses reportages, on voit souvent Martin Boudot à l'image, donner un coup de main par exemple au moment des prélèvements pratiqués sur des volontaires. "Je n'ai pas l'impression de sortir de mon rôle, estime le journaliste. Je considère que l'incarnation doit être utile : on me voit faire des prélèvements par souci de transparence. Par ailleurs je revendique le journalisme engagé, et non militant. L'engagement c'est mettre à disposition les données scientifiques aux citoyens, libre à eux d'en faire ce qu'ils veulent. On n'est pas militants parce qu'on a le souci du contradictoire, on va toujours voir en face et parfois les militants exagèrent". 

Se pose aussi la question de l'impact de ces révélations. Est-ce que les autres médias s'en saisissent, y compris dans les pays concernés ? Et plus important encore, est-ce que les politiques s'en emparent ? "J'ai voulu changer la façon dont on raconte nos documentaires. Très souvent, on m'appelait après et on me disait : 'Et maintenant on fait quoi ?' Dans cette deuxième saison, on a filmé l'impact des révélations des données scientifiques qu'on avait obtenues, comment les citoyens s'en emparaient. L'important c'est de voir comment l'information fait son chemin." 

"Sur les engrais et les taux de cadmium, il y a eu un changement concret : le gouvernement s'est engagé à réduire les taux de cadmium dans les engrais phosphatés, un décret passera en décembre. J'ai eu accès au brouillon et je peux vous dire qu'à priori, on va dans le bon sens, on sera vigilants. En Pologne ça change très radicalement et pas que grâce à nous. Les citoyens qu'on a mis en avant sont invités à la COP26. Certains ont accès aux médias nationaux et surtout la Pologne s'est engagée à sortir du charbon en 2035, le ministre de l'environnement l'a annoncé. J'espère qu'on a participé à la pression médiatique". 

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