Serge Merlin : génial "Réformateur" au théâtre de l'Oeuvre
Serge Merlin a 82 ans et c'est toujours un comédien formidable. Le grand public l’a découvert au cinéma, en vieux peintre malade dans "Le fabuleux destin d'Amélie Poulain", mais Serge Merlin c’est surtout plus de soixante ans de théâtre. Il débute au tout début des années cinquante, travaille avec les plus grands metteurs en scène - Patrice Chéreau et Matthias Langhoff pour ne citer qu'eux - et privilégie deux auteurs: Samuel Beckett et Thomas Bernhard. Bernhard est autrichien, il est mort à la fin des années 80. Et c'est donc lui qui signe "Le Réformateur".
Une pièce en forme de quasi-monologue
Celui d'un vieux philosophe, cloîtré chez lui et odieux. Il est hypocondriaque, misanthrope. Il râle, il gémit, se plaint, tyrannise sa femme. Auteur d’un traité, Traité de la Réforme du Monde, il doit ce jour-là recevoir le titre honorifique de docteur Honoris Causa. Il attend ça avec grande impatience, coincé chez lui donc, cloué dans son fauteuil et on attend avec lui. Pendant près de deux heures.
L’exercice est périlleux. Et pourtant, avec Serge Merlin, ça ne sonne jamais faux. Quand il hurle comme un dément sur sa femme, quand il pleure dans ses bras, quand il tremble, quand il rit comme un enfant, il est tour à tour effrayant et fragile et toujours il reste juste. Il faut dire que cette pièce le comédien la connait, à la virgule près. Il la jouait déjà il y a 25 ans et il l’aime, profondément. "Thomas Bernhard formule les choses avec une telle finesse " dit-il "qu’on ne voit pas l’émotion arriver. On ne voit rien et tout est là ". Quant à l'interprétation, il ne cherche pas : "Les choses s’imposent à moi par la force avec laquelle elles sont dirigées dans le texte ".
Serge Merlin "en amour" avec les mots de l’auteur. D'ailleurs, dans sa loge, il a soigneusement installé une paire de gants et une montre qui ont appartenu à Thomas Bernhard. Le comédien dit de l’auteur que c’est son "frère". Ca se voit. Et ça s'entend.
"Le Réformateur" au théâtre de l’Oeuvre à Paris jusqu’au 11 octobre.
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