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"Coup de chaud", chronique d'un bouc émissaire

Inspiré de faits réels, le nouveau film de Raphaël Jacoulot raconte comment un jeune homme souffrant d'un handicap mental, devient soudainement la cible de tous les habitants de son village, frappé par une sécheresse exceptionnelle. Jean-Pierre Darroussin, Carole Franck et Karim Leklou figurent à l'affiche de ce 3e long-métrage en salles mercredi.
Article rédigé par Florence Leroy
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
  ("Coup de chaud" Josef interprété par Karim Leklou © TS Productions)

Pour son 3e long-métrage, Raphaël Jacoulot explore la figure du bouc-émissaire, et décrit avec justesse la manière dont l'individu, confronté à la crise, peut céder aux sirènes du collectif, au mépris de la raison. 

Josef, bouc émissaire de tout un village

Dans la torpeur d'un été caniculaire, un village plonge dans la crise. La sécheresse s'abat sur les cultures, l'eau doit être rationnée. A cela s'ajoutent les petits tracas de chacun, qu'ils soient économiques ou plus intimes. Daniel, le maire interprété par un Jean-Pierre Darroussin tout en retenue, tente d'apaiser les tensions, avec ce qu'il faut de calme, de sang-froid et de compréhension. Il doit contenir la colère de Diane (Carole Franck), notamment, une agricultrice inquiète pour son exploitation.

C'est sans compter sur le cas Josef Bousou, un trentenaire souffrant d'une déficience mentale. Issu d'une famille de gens du voyage sédentarisée dans le village, Josef est épris de liberté. Il se sent à l'étroit chez ses parents, et rêve d'aller au devant des villageois, de faire des rencontres, de trouver l'amour. Mais son attitude dérange : il multiplie les petits larcins, il met mal à l'aise. A tel point qu'il devient l'obsession de tout le village, une obsession qui tourne bientôt à l'accusation.

"Les villageois vont pousser le maire à prendre des décisions, des décisions graves "

"Chacun des villageois a des problèmes propres qui ne concernent pas Josef ", explique Raphaël Jacoulot. "Mais simplement dans ce moment de tension, les villageois vont dériver de leur problématiques vers une problématique unique, qui est la gestion de Josef (...) Le maire du village c'est le personnage le plus bienveillant, il a une capacité à réguler ce village. Mais à un moment donné les villageois vont lui reprocher une forme d'interie, voire de mollesse, et vont le pousser à prendre des décisions, des décisions graves ."

Info Culture : "Coup de chaud", 3e long-métrage de Raphaël Jacoulot

Karim Leklou, acteur fascinant

Aperçu dans Marseille la nuit de Marie Monge, Karim Leklou incarne avec finesse l'ambivalence de Josef, son innocence autant que sa noirceur. Car Josef n'est pas une victime exempte de tout reproche, il porte en lui une violence inquiétante, qui au fil du temps et des provocations qui lui sont faites, se révèle avec force. Il est aussi, malgré son handicap, parfaitement lucide sur les problèmes de chacun des villageois. Et capable de s'en servir pour se défendre.

"Josef devient le catalyseur de tous les problème du village "

"C'est un personnage complexe, j'avais très envie de l'interpréter ", confie Karim Leklou. "Josef, c'est un gars de 30 ans, avec un corps de 30 ans et l'esprit d'un adolescent de 16 ans. Il est qualifié dans le film d'individu souffrant d'une débilité débonnaire affective. C'est un personnage qui désire aller vers l'autre, mais qui ne reçoit pas forcément. Il peut commettre des petits méfaits, mais rien de majeur, il m'a beaucoup plu ." 

Karim Leklou : "Josef est un personnage très complexe, j'avais terès envie de l'interpréter"

De l'influence du groupe

Inspiré de faits réels, "Coup de chaud" trouble autant qu'il fascine par la précision avec laquelle il décrit les faiblesses humaines, et la violence qu'elles peuvent générer. l'effet de groupe, les solidarités de circonstance, les petites lâchetés de l'individu face à la crise, "Coup de chaud" explore les fondements sociaux et psychologiques d'une réaction en chaîne, où la haine appelle la haine. Sans juger, il interroge le spectateur : qu'aurais-je fait, moi, à la place des villageois ?

Le casting, auquel il faut ajouter les performances magistrales de Grégory Gadebois (César du meilleur espoir masculin en 2012 pour son interprétation dans Angèle et Tony) et de Isabelle Sadoyan, donne au film un profond réalisme. 

 

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