Cinéma : "La Voie royale", quand le déterminisme social contredit l'idéal d'une méritocratie
Dans La voie royale, on suit les premiers pas de Sophie, étudiante, qui a quitté la ferme familiale pour intégrer une prépa, antichambre de l'élite. Sophie est douée en mathématiques, mais elle ne sait pas ce qu'est une prépa. C'est son professeur qui la pousse à tenter sa chance, alors que ses parents la verraient bien en DUT d'agriculture pour reprendre plus tard leur élevage.
Bien dans ses pompes, Sophie intègre comme interne un prestigieux lycée lyonnais. Pour les autres élèves, surtout les garçons, elle est la plouc qui vient d'un lycée de campagne quelconque. Mais Frédéric Mermoud n'en fait pas une victime. Elle se bat, survit au bizutage et aux premiers mois, malgré des notes en berne. Rapidement, elle ressent que la grande différence avec les autres élèves, c'est la confiance en soi, explique Frédéric Mermoud, le réalisateur.
"Elle, sait qu'elle est plutôt douée en maths, en tout cas dans son lycée de province. Et elle vient là pour les maths parce qu'on lui a dit que si elle a une prépa, elle pourrait rêver plus fort. Alors que sa copine lui dit qu'elle veut faire Normale sup, un autre veut faire Polytechnique et veut faire des start-up, le troisième veut faire les Mines.
"Chacun a déjà, avant même d'être arrivé, un plan, en quelque sorte presque dans ses gènes."
Frédéric Mermoudà franceinfo
Et c'est sans doute dans ce sens-là que les élites se reproduisent. Au fond, on donne inconsciemment à nos enfants, quand on fait partie d'une certaine classe sociale, un accès inconscient à quelque chose ou pas. Qu'est-ce qui fait que j'ai confiance en moi ou pas ?"
Sophie, c'est Suzanne Jouannet, belle découverte de ce film, où brille une fois de plus Maude Wyler en prof redoutable. Le parcours de Sophie est chaotique, ce qui sert la dramaturgie. Le plus étonnant, c'est de constater à quel point chaque élève de cette classe prépa est un archétype : la surdouée, qui finalement pense à autre chose que les maths, le besogneux qui n'ira pas très loin, le fils de bonne famille, tellement sûr de lui. Des clichés terriblement réels.
"Comme une classe, c'est un microcosme, c'était intéressant et ça me permettait aussi de peindre ce milieu par touches, un petit peu archétypiques en quelque sorte", résume Frédéric Mermoud. "C'est un petit peu l'histoire du film. Il faut qu'on apprenne aussi à s'individuer, à se singulariser, à être soi-même."
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