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Que devient le mouvement Nuit Debout de la place de la République, à Paris ?

31 mars 2016. Le mouvement Nuit Debout s'installe place de la République, à Paris. Inspirée du mouvement des indignés en Espagne ou Occupy aux Etats-Unis, l'opération a lieu simultanément dans plusieurs villes de France. Les manifestants protestent contre la loi Travail. Et dès le premier soir, la place est noire de monde.
Article rédigé par Sébastien Baer
Radio France
Publié Mis à jour
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  (Leïla Chaibi © Sébastien Baer - Radio France)

Leïla Chaibi, l'une des fondatrices de ce mouvement sans porte-parole ni leader désigné, se prend à rêver en ce premier jour de mobilisation d'un modèle de société différent. "Cela pourrait être le début d’un vrai mouvement citoyen où les gens arrêtent de baisser la tête et de se dire que la crise est inéluctable. On ne va pas se laisser faire, on relève la tête, on s’organise, on met en place un nouveau projet de société" .

Elan inattendu

Onze jours après la première Nuit Debout, les manifestants -de plus en plus nombreux- sont évacués de la place de la République. Mais rapidement, le mouvement se reforme. La foule est bigarrée, il y a des lycéens, des étudiants, des retraités, des altermondialistes, des militants d'extrême-gauche et des curieux. Tous ou presque sont là pour la "convergence des luttes" selon l'expression utilisée sur place. Il y a parfois des dérapages, des violences, mais cinq mois après le lancement de l’opération, Leïla Chaibi, l'une des initiatrices du mouvement, préfère retenir le succès inattendu et rapide rencontré par Nuit Debout. "J’ai tellement été habituée dans mon parcours militant à monter et à redescendre parce que déception, parce qu’on s’est trop enflammés, parce qu’on a eu les yeux plus gros que le ventre …." explique la jeune femme qui détaille les questions que se sont posés les cofondateurs du mouvement, fin mars.  "On s’était demandé si on annonçait ou pas un campement. Est-ce qu’on appelle les gens à venir dormir, à rester plusieurs jours place de la République ? Et on s’est dit qu'on n'allait pas annoncer de campement’, parce qu’on ne voulait pas passer pour des cons, annoncer qu’on allait être 3 000 et se retrouver à 3. C’est vrai qu’on a eu beaucoup de discussions pour savoir si ça allait marcher. Et en fait, dès le milieu d’après-midi, les gens sont arrivés en masse, on a halluciné. On avait un peu mis nos boulots de côté et nos vies familiales, en nous disant, ‘ça ira mieux après le 31’. Et en fait le 31 c’était juste le début de quelque chose" .

Nuit Debout aujourd’hui

Certes, le mouvement Nuit Debout a perdu de sa vigueur, de sa force, au fil des semaines mais Leïla Chaibi reste émerveillée par la mobilisation.  "Il faut se dire que c’est déjà un miracle, c’est déjà énorme que le mouvement ait duré aussi longtemps. C’était complètement improbable. On n’aurait jamais imaginé que les gens reviennent comme ça. Chaque jour, on se disait ‘demain, il n’y aura peut-être plus personne’ et ça, ça a duré des semaines"  explique la cofondatrice du mouvement qui voit plusieurs vertus au mouvement,  "Cela a permis à des tas de réseaux militants qui ne se fréquentaient pas d’habitude d’apprendre à bosser ensemble, tout ça illustre une vraie volonté d’une alternative par rapport au système en place" .

Images de violence

Mais tout ne s’est pas toujours déroulé comme les cofondateurs du mouvement l’auraient souhaité. Des actes de violence ont parfois été commis, comme lors de la grande manifestation unitaire du 1er mai. Et Leïla Chaibi ne cache pas que ses espoirs ont été déçus ce jour-là.  "L’objectif c’était de montrer qu’il y avait une convergence entre nuit Debout et les syndicats. On aurait pu vraiment retenir, dans l’opinion publique, la jonction entre la place de la République et les syndicats, la convergence des luttes… Mais au lieu de ça qu’est-ce qu’on a retenu du 1er mai ? Les 3 gars qui ont pété un Go Sport, le feu place de la République et les lacrymos" . Cette violence a terni l’image du mouvement, admet Leïla Chaibi qui ajoute "La violence, elle vient aussi du gouvernement et des forces de police. Sur la place de la République, les violences ont rendu service au gouvernement, ont rendu service à ceux qui voulaient stopper Nuit Debout" .

 

Fin juillet, la loi Travail a été adoptée à l'Assemblée nationale. Avec l'été, l'élan qui avait accompagné Nuit Debout s'est estompé. Mais les cofondateurs espèrent faire revivre le mouvement sous une autre forme dès la rentrée de septembre.

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