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Vingt ans après Dayton, l'Europe est-elle désormais capable de s'imposer la paix ?

Au début des années 1990, l'Europe communautaire échoue au test de la crise yougoslave et la paix se fait sous l'égide des États-Unis, mettant à mal l'image d'une Europe politique et diplomatique capable de négocier la paix sur son propre continent, à 2h d'avion de Paris. La crise ukrainienne actuelle sera-t-elle une redite de ce fiasco ?
Article rédigé par Thomas Snégaroff
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2min
  (De gauche à droite : Richard Holbrooke, l’architecte des accords de Dayton sur la Bosnie, l’ambassadeur des Nations Unies, Madeline Albright, le conseiller à la sécurité nationale Anthony Lake, le vice-président Al Gore et Bill Clinton © Reuters)

Au début de l'été 1992, aux portes de la CEE, dans le contexte de la dislocation de la Yougoslavie,  la crise yougoslave prend de l'ampleur. Cela fait un an que la tension ne fait que s'aggraver. En juin 1991, en effet, la Slovénie et la Croatie proclament leur indépendance, et cela ouvre la voie à l'engrenage furieux de la guerre civile. Le 6 avril 1992 l'armée populaire yougoslave attaque la Bosnie-Herzégovine qui vient de se déclarer indépendante. Et l'Europe tremble.

L'échec de Lord Carrington

Cela fait pourtant des mois que l'Europe communautaire tente de trouver une solution diplomatique. Robert Badinter, ancien Garde des Sceaux et Président du Conseil constitutionnel préside la Commission d'arbitrage pour la Paix en Yougoslavie qui regroupe cinq présidents de cours constitutionnelles européennes mais les résultats sont hésitants et l'action de Lord Carrington, président anglais de la Conférence pour la Paix en Yougoslavie, est un échec.

Le 25 juin 1992, sur France Inter, Annie Daubenton en rend compte aux auditeurs :

Lod Carrington a tourné autour du pot avant de faire part de l'étendu de sa déception. Le gouvernement de Belgrade n'a pas cédé d'un pouce quant au Ministre des affaires étrangères bosniaque, il s'est déclaré plus pessimiste en repartant qu'en arrivant ! 

Quelques semaines plus tard, cet échec retentissant de la diplomatie européenne se solde par la démission de Carrington.

Cette crise était un test, et l'Europe a échoué. C'est un test car dans un monde post guerre froide, l'Europe voulait prouver qu'elle pouvait se passer des Etats-Unis pour garantir la paix sur son continent. En outre, dans le contexte de la négociation du traité de Maastricht, l'Europe voulait se montrer comme une véritable union politique et diplomatique, et non plus uniquement économique.

A 2h de Paris, la situation devient dramatique

Groupes paramilitaires, déplacement forcé de population, purification ethnique, climat de terreur... "A 2H d'avion de Paris" seulement, la situation devient dramatique. En Bosnie, Serbes, Croates, Bosniaques... mais aussi combattants étrangers s'affrontent sans merci.

Alors que l'Europe piétine, c'est à l'autre bout du monde que la solution diplomatique est trouvée.

Nous sommes venus ici au coeur de l'Amérique pour ramener la paix au coeur de l'Europe, dit Warren Christopher, Secrétaire d'Etat américain.

La pique est assassine, et elle tape précisément là où ça fait mal. La partition de la Bosnie s'est faite sous l'égide américaine, reléguant les Européens au rôle d'observateurs. Néanmoins, Hervé de Charette ministre français des Affaires étrangères, tente de minimiser le fiasco.

Même si bien entendu le Président Clinton et les Américains ont cherché depuis quelques heures à tirer la couverture à eux, c'est dans leurs habitudes, la France a pesé très lourd !

La réalité est pourtant dure pour l'Europe. Et elle le sera à nouveau quatre ans plus tard, lors de la dernière crise yougoslave, la crise du Kosovo, l'intervention de l'OTAN faisant prendre conscience aux Européens de leur retard technologique par rapport aux Américains.

Aujourd'hui, vingt ans après les accords de Dayton, l'Europe est à nouveau face à un test diplomatique majeur. Face à Washington qui refuse clairement la voie diplomatique dans la crise ukrainienne, les Européens seront-ils capables d'imposer une paix négociée sur leur continent?

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