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Histoires d'info. Quand les intellectuels défendaient le consentement sexuel des enfants au nom de leur désir

Un homme comparaît devant le tribunal correctionnel de Pontoise (Val-d'Oise), mardi,  pour "atteintes sexuelles sur mineur de 11 ans". Dans les médias, quarante ans plus tôt, la question était déjà celle du consentement.

Article rédigé par franceinfo, Thomas Snégaroff
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Maillet de justice avec des dossiers et un Code pénal ouvert. (MAXPPP)

Un homme de 28 ans comparaît mardi 13 février devant le tribunal correctionnel de Pontoise (Val-d'Oise) pour "atteintes sexuelles sur mineur de 11 ans". Les parents de la fillette avaient porté plainte contre lui pour viol. Le parquet n'a retenu que le délit d'"atteinte sexuelle"C’est une question hyper sensible que celle du consentement. Elle se pose aujourd’hui pour les relations entre les adultes, on le voit avec les débats sur la "zone grise" entre consentement et rapports forcés, mais elle se pose aussi de manière différente, plus complexe encore, dans les relations entre les adultes et les enfants de moins de quinze ans.

Le "retour du contrôle sexuel"

Un débat qui rebondit dans l’actualité, mais un débat ancien, brûlant même dans la deuxième partie des années 1970 quand toute une génération d’intellectuels classés à gauche, se lèvent contre ce qu’ils appellent un "retour du contrôle sexuel".
Ils s’insurgent notamment au début de l’année 1977 après l’emprisonnement de trois adultes accusés d’avoir eu des relations sexuels avec des enfants de 13 et 14 ans, sans violence. Deux tribunes sont signées dans Le Monde. Parmi les signataires, les grands intellectuels du temps : Deleuze, Barthes, Aragon, Sartre, ou Michel Foucault qui prend la parole dans une émission de radio qui va marquer son temps, sur France Culture, La Loi de la Pudeur, diffusée en en avril 1978. Le philosophe rejette l’idée d’un consentement impossible d’un enfant qui reviendrait selon lui à nier son désir pour un adulte.

Il s’attaque ici aux psy et aux médecins qui ont pris le pouvoir. Il s’explique : "[Le psy] peut prédire qu'un traumatisme de telle ou telle importance va se produire à la suite de tel ou tel type de rapport. Et c'est par conséquent à l'intérieur du nouveau cadre législatif destiné essentiellement à protéger une fraction fragile de la population, à l'intérieur de ce cadre juridique, va se précipiter un pouvoir médical qui sera à la fois arbitraire et fondé sur une conception de la sexualité et surtout des rapports de la sexualité enfantine et adulte qui est entièrement contestable."

Le retour à l'ordre moral

Foucault et les autres rejettent ce qu’ils appellent les "lois de la pudeur ". Plus largement, ces intellectuels dénoncent un retour à l’ordre moral après les avancées des mœurs dans la foulée de mai 1968. Et pour mesure le chemin parcouru, prenez connaissance, dans la même émission, de ce que dit le philosophe Guy Hocquenghem : "Nous avons un ami qui s'appelle Gilbert Villerot qui est éducateur à Caen et qui est détenu maintenant depuis trois mois. Gilbert Villerot est inculpé pour des faits qui sont minimes, extrêmement légers, à savoir avoir simulé une masturbation devant des enfants et d'autre part avoir commis un attouchement sur l'organe sexuel de l'un des gamins qu'il a rencontré au cours d'une promenade à vélo dans la région où il se trouvait à ce moment-là."

Beaucoup de chemin a été parcouru, mais le fait que subsiste encore un débat sur le consentement d’une fillette de 11 ans prouve qu’il n’est pas encore tout à fait derrière nous.

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