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Histoires d'Info. Le bon sens, c'est quoi ?

A chaque candidet sa formule. Exemple Alain Juppé prone l'identité heureuse, François Fillon veut une révolution de bon sens. Thomas Snégaroff s'est interessé au "bon sens". Une expression utilisée par les politiques.

Article rédigé par franceinfo, Thomas Snégaroff
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
François Fillon, candidat au 2e tour de la primaire de la droite, en meeting à Lyon, le 22 novembre 2016. (CLEMENT MAHOUDEAU / MAXPPP)

Chaque candidat a sa formule. Alain Juppé prone l'identité heureuse et Alain Fillon veut une révolution de bon sens. Toutes les générations d'hommes politiques ont utilisé "le bon sens". Expression qui  ne veut rien dire. Illustration historique prestigieuse, avec l’appel à la résistance du 18 juin 1940 du Général de Gaulle : "L'honneur, le bon sens, l'intérêt  supérieur de la patrie commandent à tous les Français libres de continuer le combat là où ils seront et comme ils pourront."

Le bon sens appellerait à résister. Partons désormais au cœur du régime de Vichy. Nous sommes le 1er mai 1944, depuis le palais de Chaillot à Paris, Marcel Déat, le ministre du Travail prononce un discours en ce jour de fête du travail : "Nous avons choisi l'Europe, comme à Montoire, parce que c'était le bon sens." La collaboration, l’entrevue de Montoire d’octobre 1940 entre Pétain et Hitler, relèverait donc également du bon sens.

Résister, c’était du bon sens. Collaborer, aussi

On lui fait dire tout et son contraire au bon sens ! Ça part dans tous les... sens. En appeler au bon sens, c’est un argument irréfutable, qui s’y opposerait ?, Et donc utilisé jusqu’à la corde par nos gouvernants.  Petit florilège :

Jacques Chirac : "Les français sont gens de bon sens"

François Mitterrand : "Vous français, essayez donc au moins de m'aider, d'apporter bon sens et raison"

Nicolas Sarkozy : "Tout cela n'est pas révolutionnaire, c'est une question de bon sens"

Il y a donc une histoire de cet argument politique qu’est le bon sens. Le général de Gaulle en a usé et abusé, justifiant ainsi par exemple la décolonisation. Mais aujourd’hui, dans un contexte de défiance généralisée à l’égard des élites, cet argument prend une saveur supplémentaire. Il permet de souligner l’opposition entre des élites prétendument déconnectées et qui aurait par définition tort et le peuple, indéfinissable d’ailleurs, qui par définition aurait lui raison. Le triomphe de l’instant et de l’instant.

François Fillon, on l’a entendu appelle à une  "révolution du bon sens". Contradiction totale entre les termes : le bon sens n’est pas porteur de révolution mais bien au contraire de conservatisme. Roland Barthes l’avait parfaitement expliqué dans ses Mythologies il y a 60 ans où il écrit que : "Le bon sens est cette réaction sélective de l'esprit, qui réduit le monde idéal à des mécanismes directs de riposte."

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