Histoires d'info. En 1987, le Tour de France s'élance au pied du Mur de Berlin
Le Tour de France débute samedi. Les coureurs partiront de Düsseldorf et cela nous a rappelé un autre Grand Départ d'Allemagne, beaucoup plus symbolique celui-ci, à Berlin-Ouest en 1987.
La 104e édition du Tour de France s'élancera samedi 1er juillet de Düsseldorf, en Allemagne, et cela nous a rappelé un autre Grand Départ du Tour outre-Rhin, il y a 30 ans. Nous sommes en 1987. Il est très exactement 11h18 ce 1er juillet lorsque s'élance le premier des 207 coureurs pour un prologue dans les rues de... Berlin-Ouest. L'image est saisissante. Une foule immense s'est massée le long du parcours de six kilomètres pour acclamer les cyclistes. A quelques centaines de mètres de là, la porte de Brandebourg, encadrée par les miradors, rappelle que depuis 25 ans la ville est coupée en deux par un mur. Berlin-Est reste silencieuse à la venue du Tour de France.
Berlin, c'est pourtant très loin du territoire français. Mais depuis toujours, le Tour de France a pris l'habitude de faire des incursions à l'étranger. La première date était en 1906 avec un choix très politique, un passage en Alsace-Moselle annexée. Les Grands Départs de l'étranger sont eux un peu plus récents. Le premier a eu lieu en 1954 depuis Amsterdam. Ils sont eux aussi devenus une tradition puisque Düsseldorf sera la 22e ville étrangère qui reçoit cet honneur.
Un rôle géopolitique
Si certains spectateurs regrettent que le Tour s'élance régulièrement de l'étranger, en partie pour des raisons financières et médiatiques, ce départ de Berlin-Ouest revêt une symbolique toute particulière. Certes la ville a largement ouvert son portefeuille pour l'obtenir mais cela va plus loin, comme l'explique le mythique Jacques Goddet, directeur de l'épreuve à l'époque : "La présence du Tour à Berlin, c'est une grande symbolique. C'est la présence d'une manifestation itinérante qui a pour essentiel de se balader sur les routes, de vagabonder et qui prouve ainsi que Berlin est aussi une ville libre et ouverte".
Nous avons le sentiment que nous parvenons, au moins dans l'esprit du public, à désenclaver cette ville.
Jacques Goddet, directeur de l'épreuve à l'époque
C'est ici l'un des aspects importants de l'élargissement du Tour de France à l'étranger : son rôle géopolitique. Par ses passages répétés, le Tour entend prendre part à la réunification d'une Europe encore meurtrie et divisée. Le bourgmestre berlinois de l'époque, Eberhard Diepgen, dira que ce départ est "un oasis de liberté dans le monde communiste". Jacques Chirac, Premier ministre à l'époque, est venu donner le départ, et en profitera pour adresser un message au leader soviétique Mikhaïl Gorbatchev face à ce mur de la honte : "Comment mieux montrer qu'un esprit nouveau règne en Europe [...] qu'en détruisant les obstacles qui empêchent aujourd'hui, au coeur de l'Europe, [...] les citoyens de se rencontrer comme ils le veulent, quand ils le veulent et où ils le veulent ?" Le Tour de France restera trois jours à Berlin, comme pour mieux marteler son message. Et comme un symbole, c'est le représentant d'un pays de l'autre côté du Rideau de fer, le Polonais Lech Piasecki, qui endossera le maillot jaune.
Honneur au cyclisme allemand
Demain, le départ de Düsseldorf ne revêtira certes pas une symbolique aussi forte mais quand même. En 2007, les chaînes de télévision allemandes avaient pris la décision de suspendre la retransmission du Tour de France suite aux nombreuses affaires de dopage qui y avaient éclaté, éclaboussant entre autres leur champion Jan Ullrich. Elles bouderont le Tour pendant plusieurs années, se contentant de courts résumés.
Aujourd'hui, le cyclisme allemand est resplendissant et c'est entre autres pour lui faire honneur que le Grand Départ lui a été attribué. Et qui sait si à l'occasion du contre-la-montre d'ouverture, un Allemand ne revêtira pas le premier maillot jaune de cette 104ème édition. Pourquoi pas le champion du monde du contre-la-montre en titre, Tony Martin ?
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