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25 juillet 1915 : le génocide arménien

En juillet 1915 se déroule un des épisodes les plus sombres du conflit. Des montagnes d'Anatolie aux plaines de Syrie, des convois composés de femmes et d'enfants progressent difficilement, encadrés par des gardes armés. Les hommes, déjà massacrés, en sont quasi-absents. Ce sont les Arméniens de Turquie, que le gouvernement turc a désigné comme ennemis de l'intérieur.
Article rédigé par Grégoire Lecalot
Radio France
Publié Mis à jour
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Franceinfo (Franceinfo)

Le premier ordre est tombé le 24 avril et les chefs et les notables sont arrêtés. Le 26 juin, tous les hommes valides sont pris à leur tour. Ils seront massacrés. Parfois à la hache. Le 2 juillet, l'ordre de déportation est donné. Il sera mis en oeuvre le lendemain.

Ces scènes vécues durant le printemps et l'été 1915 dans la province de Sivas se sont répétées partout dans les montagnes d'Anatolie. Le massacre systématique de la population arménienne de Turquie - hommes, femmes et enfants - a commencé. Dès ce moment, le terme de crime contre l'humanité est lancé. Il faudra plus de temps pour poser le mot de génocide sur les horreurs que les Arméniens ont vécu. C'était tout un peuple que le gouvernement turc a alors voulu faire disparaître.

Les persécutions de la communauté arménienne de Turquie n'ont pas commencé avec la guerre , que les Turcs mènent aux côtés des Allemands, contre les Russes surtout dans un premier temps. Eclatés entre la Perse, la Russie et l'empire Ottoman, ils constituent une communauté bien distincte, avec sa langue, son écriture inventée au Ve siècle et son christianisme si particulier.

Ils sont nombreux en Turquie, et même majoritaires dans dix provinces . Quand la "question arménienne" commence à préoccuper les chancelleries mondiales, ils sont déjà soumis à des brutalités, des impôts toujours plus élevés, dont certains illégaux payés aux Kurdes transplantés là à des fins politiques. Les révoltes sont durement réprimées.

Le traité de Berlin de 1878 est un faux espoir . Sur le papier, la Sublime Porte s'engage à des réformes en faveur des arméniens. En fait, les Turcs considèrent que cette question est de plus en plus embarrassante et qu'elle justifie des ingérences étrangères. Le développement du sentiment national arménien, avec la création du Dachnak , la Fédération des révolutionnaires arméniens, en 1890, inquiète aussi bien les Russes que les Turcs, et même la bourgeoisie arménienne. Adhérant à la IIème Internationale en 1907, il protège et politise les petits paysans, avec ses groupes de combat mobiles.

La répression est sauvage . Le sultan Abd-ul-Hamid réagit par des massacres en 1895. Mais en 1896, coup d'éclat du Dachnak . Il s'empare de la banque Ottomane de Constantinople, le plus célèbre établissement financier d'Orient, où toutes les grandes puissances ont des intérêts. Les massacres se poursuivent en retour. Près de 250.000 Arméniens seront tués de 1894 à 1897. Plus d'un million sont dépouillés, les églises sont détruites, des villages rayés de la carte.

Après un court intermède de fraternisation, la révolution Jeune-turque reprend la "turquisation" . Partisans d'un nationalisme turc sans concession et les massacres et brimades se poursuivent, au point que la communauté internationale finit par s'en mêler. En juillet 1914, deux inspecteurs généraux sont nommés par la France, la Grande-Bretagne et la Russie. La guerre éclate avant qu'ils n'arrivent.

Le drame se noue en plein conflit . Après avoir échoué à soulever les Arméniens de Russie, les Turcs subissent une lourde défaite face aux Russes à Sirakamish, tandis que les franco-britanniques caressent le projet de prendre Constantinople par un débarquement dans les Dardanelles. A l'est, la ville de Van se soulève et proclame un gouvernement arménien autonome. Aux abois, le gouvernement turc voit dans les Arméniens un "ennemi de l'intérieur"...

 

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