Présidentielle 2022 : Christiane Taubira, de l'élan à l'élection ?
Tous les jours, Clément Viktorovitch décrypte les discours politiques et analyse les mots qui font l'actualité.
Christiane Taubira est sortie du silence, vendredi 17 décembre, et a annoncé : "J'envisage d'être candidate à l'élection présidentielle de la République française" dans une vidéo publiée sur Facebook, dans laquelle elle donne "rendez-vous à la mi-janvier". Est-ce une tornade politique... ou une tempête dans un verre d'eau ?
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Les considérations strictement politiques sont relativement claires : Christiane Taubira ouvre la porte à un rassemblement derrière elle d'une partie de la gauche. Jean-Luc Mélenchon semble bien décidé à défendre son programme devant les électeurs, quoi qu'il en soit. Mais pour ce qui est de Yannick Jadot et Anne Hidalgo, l'éventualité d'une candidature rassemblée n'est pas exclue dans la mesure où leurs propositions sont a priori compatibles, et où leurs campagnes peinent pour l'instant à décoller. On pourrait même imaginer qu'ils soient rejoints par Arnaud Montebourg.
Ce qui compte, c'est vous. ChT pic.twitter.com/ZSxVLpeaim
— Christiane Taubira (@ChTaubira) December 17, 2021
Une candidature derrière Christiane Taubira est-elle possible ? Peut-être, cela aurait du sens. On sait que Christiane Taubira suscite de l'enthousiasme chez de nombreux électeurs et électrices de gauche. Après, quel pourrait-être le vecteur d'un tel rassemblement ? Anne Hidalgo pousse à ce que cela passe par la primaire populaire, au sein de laquelle Christiane Taubira possède de nombreux soutiens. Yannick Jadot y a toujours opposé une fin de non-recevoir. Aujourd'hui, il a même réaffirmé qu'il serait de toutes façons le candidat de l'écologie, en invitant ses concurrentes et concurrents à se rassembler derrière lui. Bien sûr, on ne peut pas exclure de les voir s'accorder sur une primaire ou une candidature commune dans les semaines à venir, mais au moment où nous parlons, disons que les discussions semblent compliquées.
Une ligne floue, une candidature incertaine
En termes rhétoriques maintenant : est-ce que la déclaration de Christiane Taubira est de nature à changer la donne ? C'est toute la question. "J'envisage d'être candidate" : l'expression est évidemment surprenante. Alors, d'un point de vue politique, elle se comprend : c'est ce mot, "j'envisage", qui lui laisse une porte de sortie au cas où sa proposition d'union se verrait rejetée.
Mais d'un point de vue rhétorique, elle se heurte à une règle élémentaire : plus on s'affirme, plus on triomphe des réticences. Ou, pour le dire plus clairement : plus on paraît convaincu, plus on en devient convaincant. Or, en continuant de mettre en avant ses propres hésitations, Christiane Taubira prend le risque de susciter de la circonspection plutôt que de la motivation. En un mot : tout cela manque un peu de panache.
Est-elle convaincante sur le fond ? "Renforcer la cohésion sociale, assurer la sûreté et la sécurité, réaliser la belle ambition d'égalité et de justice sociale, rendre le monde moins brutal, plus sûr", affirme-t-elle dans cette vidéo. Tout le monde est d'accord… Mais c'est bien le problème justement : tout le monde est d'accord ! Nous nageons à nouveau dans un océan de concepts mobilisateurs : ces mots grandiloquents mais vides de sens, qui parlent à tout le monde sans rien dire à personne.
Il y a même cette phrase étonnante : "Des réponses claires et stables à apporter à ces sujets difficiles que sont les sources d'énergie ou l'armement." Certes, mais lesquelles ? Pour l'instant, on n'en saura pas plus. La ligne politique de Christiane Taubira reste, pour l'instant, aussi floue que sa candidature est incertaine. C'est donc une tempête dans un verre d'eau plutôt qu'une tornade politique, mais attendons ! La politique française a montré qu'elle pouvait être surprenante et, encore une fois, Christiane Taubira suscite l'élan d'une partie de la gauche. Mais de l'élan à l'élection, il y a un pas, et il n'est pas évident.
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