En Tunisie, des ONG dénoncent la remise d'un réfugié politique algérien aux autorités de son pays
Ces organisations de défense des droits humains accusent Tunis de "violer ses engagements internationaux". Selon elles, Slimane Bouhafs un militant algérien, a été enlevé puis livré aux autorités de son pays.
C’est une affaire qui secoue la Tunisie. Plus de 40 associations et ONG dont Amnesty International ou la Ligue tunisienne des droits de l'Homme, affirment que Tunis a livré Slimane Bouhafs à Alger.
En septembre 2016, ce militant algérien âgé de 54 ans a été condamné en en appel à trois ans de prison pour "atteinte aux préceptes de l’islam et propos indécents à l’égard du Prophète Mohamed". Il est membre également du Mouvement pour l'autodétermination de la Kabylie (MAK), une organisation indépendantiste classée "terroriste" par les autorités algériennes.
Le statut de réfugié bafoué
En 2020, Slimane Bouhafs avait obtenu le statut de réfugié en Tunisie. Mais le 25 août dernier, il a été enlevé à Tunis. Des voitures se sont présentées devant son domicile. Puis le militant a été emmené vers une destination inconnue, selon les témoignages recueillis par des associations de défenses des droits humains.
Les ONG dénoncent "le kidnapping d'un réfugié que Tunis devait protéger". Nadia Chaabane, femme politique et militante féministe tunisienne partage cette indignation. "Il était sur le territoire tunisien en tant que réfugié. Donc la Tunisie ne pouvait pas l’extrader. Il ne pouvait pas faire l’objet d’une transaction ou d'un deal quelconque. Là, la Tunisie se met en porte à faux par rapport à toutes les conventions qu’elle a ratifiées. Tout cela est balayé d’un revers de main".
C'est un précédent grave. Beaucoup de réfugiés politiques vivent en Tunisie. Aujourd'hui ils vivent avec une épée de Damoclès au-dessus de leur tête
Nadia Chaabanefranceinfo
Amnesty International demande une enquête "impartiale et approfondie sur la disparition forcée et l'expulsion de Slimane Bouhafs vers l'Algérie". Plusieurs questions subsistent. Qui a enlevé ce militant ? Est-ce la police tunisienne pour le livrer à Alger ? Ou est-ce les autorités algériennes elles-mêmes ? "On est dans un état de non-droit, c'est grave", s'insurge Nadia Chaabane.
Les ONG dénoncent un dangereux précédent. "Si Bachar al Assad nous demande de lui livrer des réfugiés syriens, les livrerons-nous ?", interpellent-elles. Elles dénoncent également l’état d’exception en vigueur depuis le 25 juillet en Tunisie. Elles pointent une "atteinte aux droits et libertés" et l'enlèvement de Slimane Bouhafs en serait un exemple flagrant.
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