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En Thaïlande, la bouée canard jaune est devenue le symbole de la lutte contre le pouvoir

Des manifestations étudiantes ont lieu chaque fin de semaine depuis des mois en Thaïlande. Les jeunes protestataires réclament le départ du gouvernement, une réécriture de la Constitution et surtout une réforme de la monarchie. Leur porte-étendard : une bouée en plastique.

Article rédigé par franceinfo - Carol Isoux
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Des manifestants thaïlandais brandissent des bouées gonflables jaunes en forme de canard lors d'une marche à Bangkok en Thaïlande, le 27 novembre 2020. (LILLIAN SUWANRUMPHA / AFP)

Il est jaune, il est mignon et surtout il est imperméable… C’est bien sûr le canard en plastique, devenu sous sa forme de bouée géante la mascotte du mouvement étudiant thaïlandais. Les manifestations se multiplient depuis des mois contre le pouvoir en place et les étudiants réclament une réécriture de la Constitution. Et, pour la première fois de l'Histoire du pays, une réforme de la monarchie.

Au départ, la fonction de la bouée canard est purement pratique, il s’agit de se protéger des puissants jets des canons à eau de la police. Ils envoient de l’eau bleutée mélangée à des produits chimiques qui marquent la peau et les vêtements et permettent d’identifier les manifestants en fuite. Une méthode musclée qui a pris de court des manifestants pacifiques. "Tout à coup ils ont sorti les canons à eau, les gaz lacrymogènes… Nous, on n’avait rien pour se protéger, pas d’armes, rien que des parapluies et des bouées canard en plastique. On ne fait de mal à personne, il n’y a eu aucune violence. C’est ça le devoir de la police, vraiment ?", interroge un lycéen. 

Depuis, le fameux canard est partout, sur des produits  dérivés, des t-shirts, des gourdes, des accessoires pour cheveux et même des faux billets de banque. La star des manifestations, c’est bien lui.

Un canard symbole mondial de contestation

Ce canard n’en est pas à son premier mouvement social. Cela fait plusieurs années maintenant qu’il apparaît dans des manifestations sur plusieurs continents. À l’origine c’est une œuvre de l’artiste hollandais Florentijn Hofman. Il en a créé plusieurs, exposés dans différentes villes du monde, à Sydney, à Bakou ou encore à Hongkong où il avait fait un tabac en 2013. Le gouvernement chinois avait même fini par faire bannir l’expression "gros canard jaune" des moteurs de recherche, car des internautes facétieux s’étaient amusés à faire circuler la fameuse photo de la place Tiananmen en 1989 en remplaçant les chars par des canards géants. Mystérieusement, l’exposition avait d’ailleurs tourné court, avec la découverte, un matin de la dépouille du canard complètement dégonflée dans la baie de Hongkong, des images qui avaient fait le tour du monde.

Depuis, le canard rebelle a été vu dans des manifestations anti-corruption en Russie, en Serbie et plus récemment en Pologne. Son utilisation dans les manifestations thaïlandaises révèle à la fois la caractère globalisé de ces manifestations de jeunesse et confirment le lien tout particulier avec les manifestants hongkongais, dont les Thaïlandais s’inspirent souvent de la mise en scène et des méthodes. Quelques jours avant d’entamer son séjour en prison le célèbre activiste hongkongais Joshua Wong concluait sur son compte Twitter un message de solidarité envers ceux qu’ils appelle ses camarades thaïlandais par la formule : "La créativité vaincra. Longue vie au canard en plastique."

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