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En direct du monde. En Egypte, Mickey, Minnie, Donald bannis des écoles de Qalyubia

En décrochant les portraits de Mickey pour les remplacer par des martyrs, le gouverneur de Qalyubia espère que les élèves égyptiens prennent en exemple ces soldats qui combattent le terrorisme, et les perçoivent comme des modèles.

Article rédigé par franceinfo, François Hume-Ferkatadji
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Un Egyptien vote dans une école à Benha, le 2 décembre 2015. (SAMEH ABUL HASSAN / ALMASRY ALYOUM)

En Egypte, le gouverneur de Qalyubia, une région au nord du Caire située dans le delta du Nil, a demandé à ce que les dessins de Mickey Mouse et de ses amis soient retirés des murs des écoles publiques afin d’être remplacées par des portraits de martyrs, civils ou militaires égyptiens, morts dans les attentats ou les combats causés par les extrémistes islamistes.

Des personnages "inventés par des Américains"

En décrochant les portraits de Mickey pour les remplacer par des martyrs, des "héros militaires" dit-il, il espère que les élèves égyptiens prennent en exemple ces soldats qui combattent le terrorisme, et les perçoivent comme des modèles. Alaa Marzouk a également avancé un autre argument, expliquant que Mickey et Donald sont des personnages inventés par les Américains, et qu’il fallait plutôt mettre en avant des figures locales qui puissent renforcer le patriotisme des enfants et l’amour du pays.

Cette décision a suscité pas mal de moqueries de la part des internautes égyptiens : la volonté des autorités égyptiennes d’imposer des idées, des valeurs, des chants, des programmes patriotiques aux élèves égyptiens semblent atteindre des stades toujours plus avancés. Depuis l’année dernière, les élèves égyptiens doivent déjà chanter tous les matins des chants à la gloire des martyrs, en marque de soutien aux opérations de l’armée égyptienne dans le Nord-Sinaï.

L’éducation publique est l’une des moins bien classées au monde

Les internautes se sont par ailleurs demandé si c’était vraiment une bonne idée que de tapisser les murs des écoles d’images d’hommes et de femmes assassinées. D’autre part, l’éducation publique égyptienne est l’une des moins bien classées au monde : corruption des professeurs, classes surchargées, méthodes pédagogiques obsolètes et petit budget… Les internautes les plus critiques s’étonnent donc des priorités - à tout le moins étranges -  du gouverneur quant à l’éducation des élèves.

Ce n’est pas la première fois que Mickey fait l’actualité en Egypte : en 2012, le milliardaire égyptien et magnat des télécoms Naguib Sawiris s’était retrouvé devant les tribunaux pour avoir posté sur son compte Twitter une photo de Mickey et de Minnie, grimés en salafistes, lui portant la barbe, et elle le niqab. Il voulait railler le camp intégriste mais face au scandale, il a été jugé pour "insulte à l’islam". Il avait finalement été relaxé.

Trois ans de prison pour un montage photo

Une histoire bien plus dramatique, un étudiant en droit de 22 ans, Amr Nohan, a été condamné en 2015 à 3 ans de prison. Il est sorti récemment très affaibli après cette longue incarcération. Son tort ? Avoir partagé sur Facebook un montage réalisé sur Photoshop montrant la tête du président égyptien Abdel Fatah el Sissi affublée des oreilles de Mickey. L‘étudiant explique aux juges qu’il ne sait pas se servir de Photoshop et qu’il n’est pas l’auteur du montage. Mais ce n’est pas suffisant, il est condamné pour "tentative de renversement du régime". A l’époque son frère a commenté avec ironie, cette décision de justice absurde : "Maintenant, on peut vraiment dire qu’on vit dans un Etat Mickey Mouse." N’en déplaise au gouverneur de Qalyubya. 

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