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Aux Pays-Bas, un tableau de Rembrandt ausculté par des chercheurs devant le public : "On dirait presque une installation d'art contemporain"

Une vingtaine de chercheurs analyse la "Ronde de nuit" du maître de l'école hollandaise, sous les yeux des visiteurs du Rijksmuseum d'Amsterdam. 

Article rédigé par Pierre Benazet - Édité par Thomas Pontillon
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Des chercheurs devant le tableau la "Ronde de nuit" à Amsterdam.  (FREEK VAN DEN BERGH / ANP)

Trois-cent soixante-quinze ans après les premiers coups de pinceau de Rembrandt, sa monumentale Ronde de nuit, achevée en 1642, fait l'objet depuis lundi 8 juillet d'une vaste enquête scientifique. Les chercheurs du célèbre Rijksmuseum d’Amsterdam aux Pays-Bas ont entamé des recherches en profondeur pour déterminer quelles opérations de restauration pourraient être nécessaires. Mais ce qui est insolite, c'est que les chercheurs travaillent sous les yeux des visiteurs. L'objectif est de ne pas les priver d’une des œuvres phares du musée. 

Des chercheurs enfermés dans une cage en verre 

Face à l'immense toile de 3,80 m de haut sur 4,50 m de large, un appareillage sophistiqué est installé. Le tableau lui-même peut se déplacer d’avant en arrière, une poutrelle métallique s’élève de bas en haut et un double plateau élévateur se déplace en largeur et en hauteur. Un gigantesque scanner est déployé pour la première phase des recherches. Autour, les chercheurs du Rijksmuseum s’activent pour les premières mesures sous les yeux des visiteurs dont ils sont séparés par une cage de verre de sept mètres sur sept.

Les visiteurs doivent tout de même se hausser quelquefois sur la pointe des pieds comme David, enseignant dans les Vosges, qui ne voulait pas rater la Ronde de nuit. "Ça gâche, quand même, car on ne voit pas le tableau dans son intégralité. Ça dépend où est situé l'espèce de chariot qui est devant l'œuvre car il circule devant la toile pour prendre les photographie, explique-t-il. À un moment, on écoutait un passage sur le petit chien qui est en train de disparaître [un détail du tableau] mais la machine était juste devant." 

C'est intéressant de voir la restauration sur place plutôt que le tableau soit enlevé du musée pendant plusieurs mois ou des années. Le concept est bien pour les visiteurs 

David, un visiteur

à franceinfo

Pour Elsa, venue de Paris, l'activité des chercheurs est loin de déplaire. "Ça donne un côté très contemporain à l'œuvre, c'est intéressant de voir tout ce qui se passe autour. Avec la cage en verre, on dirait presque une installation d'art contemporain, on pourrait dire qu'il y a une performance en cours. Ça ne me gâche pas la visite ni la découverte de l'œuvre", détaille-t-elle. 

Pendant près d'un an, une vingtaine de chercheurs du Rijksmuseum vont se succéder devant la Ronde de nuit pour des opérations de tomographie, d'UV, d'infrarouge, ou encore de diffraction et d'imagerie hyperspectrale.

À la recherche d'indices sur les couleurs de Rembrandt 

Parmi les scientifiques qui s'affairent autour de la toile, il y a Victor Gonzalez, docteur en chimie. Il va étudier avec passion les pigments utilisés par Rembrandt il y a près de 400 ans. "L'enjeu ici est de retrouver éventuellement la couleur originale, explique-t-il. Peut-être qu'on n'est pas à l'abri d'autres surprises, et qu'on va découvrir d'autres matériaux qui sont uniques à 'la Ronde de nuit'. On sait que cela a été une commande très importante pour Rembrandt. Peut-être qu'il a expérimenté... Peut-être qu'on va trouver de nouveaux indices pour des nouvelles couleurs de Rembrandt". 

Ces recherches permettront peut-être de faire réapparaître le petit chien dont les couleurs se sont effacées au fil des siècles. Le musée espère pouvoir ramener la Ronde de nuit à une apparence proche de celle de 1642.

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