Au Venezuela, le prix de l'essence va fortement augmenter pour lutter contre la contrebande
Les Vénézuéliens bénéficient du prix de l'essence le plus bas du monde, malgré une inflation galopante. Mais c'est peut-être bientôt terminé : le gouvernement vénézuelien veut aligner ce prix aux standards internationaux.
Le Venezuela est frappé par la pire crise économique de son histoire. L’inflation dépasse cette année le million de % selon le Fonds monétaire international. Et pourtant cela reste le pays où le prix de l’essence est le plus bas du monde. Mais le gouvernement veut aligner ce prix aux standards internationaux, pour endiguer la contrebande. Selon le président Nicolas Maduro, elle représenterait un manque-à-gagner de 18 milliards de dollars sachant que 96% des recettes du pays sont liées au pétrole.
Un nouveau système de paiement de l'essence
Le gouvernement est en train de tester un nouveau système de paiement de l’essence pour permettre à certains Vénézuéliens de continuer de profiter de prix réduits. Jusqu’à présent l’essence au Venezuela se payait en espèces, à un prix au litre équivalent à un centième de centime de dollar. Avec le nouveau système, il faudra payer par carte bancaire. Si vous avez le carnet de la patrie, un document d’identité biométrique instauré en 2017 indispensable pour recevoir la plupart des aides sociales, vous serez débité d’un prix subventionné équivalent au prix actuel. Sinon, il faudra payer un prix international qui n’a pas encore été annoncé, mais qui sera inabordable pour la grande majorité des Vénézuéliens. On estime qu’environ 80% de la population touche le salaire minimum, équivalent à une dizaine de dollars.
Empêcher la contrebande ou contrôler la population ?
Tout cela dans le but d'empêcher la contrebande. Mais dans les faits, on voit mal ce qui empêchera un détenteur du carnet de faire passer de l’essence à prix réduit de l’autre côté de la frontière. C’est d’ailleurs ce qui provoque la colère de l’opposition. Elle estime que le gouvernement cherche en fait à contrôler sa population via le carnet de la patrie. Depuis l’annonce de la mesure en août, le nombre de détenteurs du document est passé de 15 à 20 millions, soit deux tiers des Vénézuéliens. Pour Carlos, chauffeur de taxi, il était inenvisageable de payer le prix fort : "pour moi c’est un moyen de subsistance. Il m’est impossible de payer le prix international. J’ai besoin du prix subventionné pour travailler, pour m’occuper de ma famille, c’est une sécurité personnelle".
Le mythe du "carnet de la patrie"
Mais le carnet de la patrie permet-il réellement au gouvernement d’exercer une pression sur les Vénézuéliens ? Il donne effectivement accès à beaucoup d’informations personnelles, mais il s’est tellement généralisé que c’est pratiquement devenu une carte d’identité. Selon Jesus Gonzalez, professeur de sciences politiques à l’université centrale du Venezuela, le contrôle est plus psychologique qu’autre chose : "ce mythe que les gens entretiennent à propos du carnet de la patrie renforce en fait le contrôle du gouvernement sur la population : c’est la peur qu’ont les citoyens d’être totalement contrôlés qui rend ce contrôle effectif".
Cette mesure sera effective lorsque le prix international sera annoncé. Mais cette annonce est sans cesse repoussée. En fait la mesure se heurte à une barrière de taille : les coupures d’électricité et d’internet se multiplient dans le pays. Donc le système de paiement électronique risque souvent de ne pas fonctionner. Dans ce cas-là, les automobilistes continueront de payer en espèces, et comme les billets ne valent plus rien à cause de l’inflation, les prix resteront les mêmes.
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