Au Burkina Faso, une mineure sur deux est mariée : "Des filles de 12 ans tombent enceintes et abandonnent les études"
Au Burkina Faso, les autorités et les ONG s'alarment de la persistance des mariages précoces et forcés. Selon l'Unicef plus de la moitié des femmes sont mariées avant l'âge de 18 ans et 10 % d'entre elles ont moins de 15 ans.
Le gouvernement burkinabé tente de lutter contre les mariages précoces et forcés. Dans le pays, une femme sur deux s'est mariée avant l'âge de 18 ans selon l'Unicef et 10 % d'entre elles ont moins de 15 ans.
Un code de la famille bafoué
Officiellement, le mariage précoce est interdit par la loi. Selon le code de la famille, une jeune fille ne peut être mariée avant l'âge de 17 ans, 20 ans pour les garçons. Le mariage peut être autorisé pour les filles de moins de 15 ans et des garçons de moins de 18 ans mais uniquement si un tribunal accorde une dispense spéciale, une procédure rarement utilisée. Et si ce code n'est pas respecté, des sanctions sont prévues. Le mari qui n'est pas désiré peut être accusé de viol et les parents de la victime de complicité.
Un des taux les plus élevés de mariages forcés
Ces mariages forcés, s'ils sont condamnés officiellement, se pratiquent discrètement, dans les circuits traditionnels et religieux et sous d'autres formes. Christiane Nitiema est juriste au centre d'écoute et de défense des femmes à Ouagadougou. Ce centre accueille notamment des jeunes filles qui ont fui leur famille.
"Quand la fille atteint l'âge de 10 ans par exemple, elle est envoyée chez sa tante, c'est-à-dire la soeur de son papa, qui vit dans un autre village et elle part, on l'inscrit à l'école, mais la tante lui donne beaucoup de travaux. On ne suit pas ses études. Elle est déscolarisée", explique Christiane Nitiema.
A ce moment-là, on dit que la fille ne veut pas faire d'études et on la donne en mariage. Donc, là, elle n'est pas chez elle, en famille chez ses parents, mais chez sa tante, qui la donne en mariage où elle vit
Christiane Nitiema, juristefranceinfo
Des mariages organisés par des familles pauvres
Deux raisons expliquent que les parents marient leurs enfants alors qu'ils sont mineurs. La première est économique. Marier sa fille permet à une famille pauvre de se débarrasser d'une bouche à nourrir lorsque les temps sont durs. D'autant que dans les mariages traditionnels, le mari doit apporter une dot qui peut aider la famille de la mariée. La seconde raison est liée à la sexualité précoce des adolescents et à l'absence d'éducation sexuelle, explique Christiane Nitiema.
Les filles ne sont pas éduquées à se prendre en charge et à se protéger, ce qui fait que du coup, les filles tombent enceinte, des filles de 12 ans, 13 ans, 14 ans, qui tombent enceintes de jeunes garçons de leur âge
Christine Nitiema, juristefranceinfo
"Les enfants s'engrossent entre eux, et c'est un vrai problème actuel. Les filles sont encore très jeunes. Elles abandonnent les études parce qu'elles sont enceintes", s'indigne la juriste.
Ces jeunes mères célibataires jettent le déshonneur sur les familles. On cherche alors à tout prix à les marier avec le géniteur de l'enfant ou bien un autre homme. Pour éviter ces grossesses précoces et les mariages qui en découlent, les autorités ont choisi d'intégrer des cours d'éducation sexuelle en classe de CM2. On apprend aux filles et aux garçons les différents moyens de contraception, mais aussi à changer, nourrir, soigner, s'occuper d'un nourrisson, au cas où.
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