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À Bombay, les derniers villages de pêcheurs tentent de résister au changement climatique et aux promoteurs immobiliers

Les derniers villages de pêcheurs au coeur de Bombay sont menacés par la construction urbaine et le dérèglement climatique. Mais les habitants refusent de voir leur activité disparaître et de céder leurs maisons. 

Article rédigé par franceinfo - Côme Bastin
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
L'activité des pêcheurs à Bombay, en Inde, aujourd'hui menacée par le dérèglement climatique et la croissance urbaine.  (PUNIT PARANJPE / AFP)

En plein cœur de Bombay, en Inde, subsistent plusieurs villages de centenaires de pêcheurs. Ce sont les premiers habitants de cette ville qui en compte aujourd'hui  30 millions. Aujourd’hui menacés par le dérèglement climatique et le développement de la capitale économique indienne, ces pêcheurs ont décidé de ne pas se laisser faire et ont manifesté dans le village de Worli le 7 novembre. 

Pour planter le décor il faut s’imaginer la façade maritime de Bombay recouverte de gratte-ciels et là, une péninsule de terre avec de petites bicoques entourées de bateaux. C’est ici que Bharat Worli, 54 ans, a exprimé sa colère. "Nous, les pécheurs, avons toujours vécu à Bombay mais sommes devenus indésirables. L’odeur des poissons qui sèchent, ça dérange les nouveaux riches. Dès qu’on veut rénover nos maisons, on nous refuse le permis de construire."

"Ils veulent que l’on parte pour construire de belles villas au bord de l’eau pour les stars !"

Bharat Worli, pêcheur de 54 ans

à franceinfo

Les pêcheurs existaient en effet avant que les Britanniques ne relient les sept îles qui forment aujourd’hui Bombay. Et si les locaux sont si remontés ce jour-là, c’est qu’un nouveau projet d’autoroute posée sur la mer risque de les empêcher de naviguer. "Il faut passer à distance des piliers qui sont très proches, explique Camillo Quinty à bord de son bateau. Lors des marées hautes ou lorsque le vent souffle, le bateau est bringuebalé par les vagues, c’est très dangereux. Quelqu’un qui n’est pas habitué se tuerait ici. Et regardez, maintenant ils rajoutent de nouveaux piliers." Il existe une vingtaine de villages de pêcheurs dans Bombay et beaucoup craignent que cette nouvelle route maritime les condamne. 

Une activité sérieusement menacée

Vivre de la pêche est devenu de plus en plus difficile au milieu de cette ville géante. Et ce n’est pas seulement lié aux constructions. "On a dû aller pêcher à 30 kilomètres au large", martèle Raghans Tapke au marché aux poissons du village de Versova. A 56 ans, il est le secrétaire général de l’association des pêcheurs. "Avec le réchauffement des eaux et la pollution de la ville, les cycles de pêche sont très perturbés. Ces poissons sont moins appréciés des habitants, poursuit-il, alors on les vend aux industriels qui en font une bouillie en usine pour fabriquer du Surimi."

"On est à la merci des tarifs du marché. Entre les prix de l'essence et les salaires de l’équipage, ce travail ne rapporte presque plus."

Raghans Tapke, secrétaire général de l'association des pêcheurs de Versova

à franceinfo

Plusieurs associations protestent contre ce projet de route sur les eaux. Les écologistes soulignent qu’elle risque d'être submergée avec l’augmentation des cyclones. Beaucoup d’habitants sont attachés à ces vieux villages où règne une ambiance bohème. Mais pris entre le changement climatique et l’appétit des promoteurs, les pêcheurs vont avoir bien du mal à sauver leur mode de vie.

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