Solidarité européenne: l'heure de vérité
"Il y a bien longtemps que nous aurions dû avoir ce débat", s'est exclamé Alexis Tsipras au terme de plusieurs heures d'échanges souvent houleux avec les représentants élus des 28 Etats membres de l'Union.
Un Débat qui "pour la première fois, ne s'est pas tenu derrière des portes closes. Il ne doit pas être mené derrière des portes fermées"
Le premier ministre grec a insisté sur ce point, plaidant pour un rôle renforcé du Parlement européen, y compris au sein de la "Troïka" des créanciers.
Et pourtant Alexis Tsipras avait d'abord été réticent à répondre à son invitation, lancée par le belge Guy Verhofstadt, président du groupe libéral et ancien rival de la campagne pour la tête de la Commission l'an dernier, invitation reprise par un autre ancien opposant des Européennes, le social-démocrate allemand Martin Schulz, président du Parlement européen très critiqué pour avoir fait campagne pour le oui au référendum grec, en brandissant la menace d'un Grexit en cas de victoire du non.
L'après-référendum
Fort des 62% de "non" qui l'ont conforté dans sa légitimité démocratique, Alexis Tsipras est venu rappeler aux Européens qu'il ne voulait pas sortir de la zone euro, qu'il n'y avait pas de" plan caché" dans ce sens, qu'il ne cherchait pas la rupture avec l'Europe, qu'il voulait en respecter les règles, tenir ses engagements, mais en ayant le choix d'une austérité plus sociale. Car, a-t-il expliqué :
"Ce que l'on surnomme la crise grecque ce n'est que l'incapacité totale de la zone euro à trouver une solution définitive à un problème de dette qui s'est lui-même auto-alimenté".
La Grèce, laboratoire de l'austérité
C'est un problème européen qui nécessite une solution européenne". Avant d'ajouter: "Mon pays a été utilisé comme laboratoire de l'austérité et cette longue expérience de 5 ans et demi a totalement échoué, chacun peut le constater et l'admettre", en évoquant l'explosion du chômage et de la pauvreté. "Le peuple grec estime qu'il n'a plus d'autre choix que de tourner le dos à cette voie sans issue".
Et Alexis Tsipras d'annoncer que ses propositions de réformes contiendraient :
"une juste répartition du fardeau: Nous voulons lutter contre le règne des oligarchies et des cartels, contre la fraude et l'évasion fiscale, nous voulons moderniser l'Etat. Ce sont pour nous des priorités et nous attendons l'accord de nos partenaires sur ces priorités".
Le premier ministre grec a rappelé que la Grèce avait fait partie des créanciers de l'Allemagne lors du traité de Londres en 1953, ce qui avait permis à cette dernière d'éponger plus de 60% de sa dette.
Le clan des sceptiques
Manfred Weber, eurodéputé allemend de la CSU et président du groupe du Parti populaire européen (centre-droit) a répondu:
"A cette heure il n'y a pas de proposition concrète qui pourrait servir de base de discussion"
Guy Verhofstadt a ajouté :
"Je suis furieux. Vous nous parlez de réformes, nous n'en voyons pas la couleur sous forme de propositions concrètes. Nous ne marchons plus vers le Grexit, nous y courons".
Le président du Conseil européen Donald Tusk a insisté :
"C'est vraiment la toute dernière chance pour la Grèce. Nous devons trouver un compromis digne et efficace afin d'éviter la rupture. Nous devons agir et nous allons prendre nos responsabilités historiques".
Dès le lendemain Athènes proposait 13 nouvelles pages de réformes, qui comprennent une hausse de la TVA, des coupes dans les retraites et des privatisations, conformément aux exigences de ses créanciers.
La solidarité européenne est-elle inconditionnelle? Quelles sont ses limites? Quelle valeur accordons-nous à la démocratie directe? Alors que le sort du peuple grec est entre les mains des dirigeants européens, qui dans cette crise ont si souvent évoqué la tragédie grecque, Alexis Tsipras en appelle à se référer à Antigone de Sophocle: "Elle nous a appris qu'l y a des moments où la loi suprême, la loi qui l'emporte sur celle des hommes est celle du droit, de la justice des hommes. Et je crois que ce moment est venu".
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