Afghanistan : la diffusion "d'images d'êtres vivants" interdite dans les médias par le régime taliban
C'est un pas de plus vers l'obscurantisme. Le porte-parole du ministère afghan de la Promotion de la vertu et de la Prévention du vice a confirmé, lundi 14 octobre, la mise en œuvre progressive d'une loi pour "interdire aux médias la diffusion d'images d'êtres vivants" comme "des contenus hostiles à la charia et à la religion". La mesure fait partie d'un ensemble d'articles "pour promouvoir la vertu et prévenir le vice" dans la population, en vertu de la loi islamique. Une loi comprenant 35 articles qui limitent le travail des médias, et toute expression publique, en particulier celle des femmes.
En pratique, ça signifie que les visages doivent peu à peu s'effacer, et que la police des mœurs sera chargée de veiller à la diffusion de photos et vidéos. "Il s'agit seulement de donner des conseils et de convaincre les gens que ces choses doivent être évitées", croit rassurer le gouvernement, qui explique commencer à diffuser la consigne dans les différentes provinces du pays. Aucune arrestation n'a été signalée jusqu'ici, mais il a par exemple été conseillé à des reporters de la province de Ghazni dans le centre du pays de "s'habituer à moins filmer et à prendre des photos de plus loin". Des journalistes, mais aussi des commerçants du Wardak, dans le centre du pays, ont été prévenus : "la loi va s'appliquer à tout le monde". Il faut donc barrer les visages sur les publicités ou recouvrir de sacs plastiques les têtes des mannequins dans les vitrines des magasins. Des agents zélés du ministère ont même forcé des restaurateurs à cacher les yeux des poissons sur les cartes des restaurants...
Des libertés de plus en plus restreintes
Trois ans après le retour au pouvoir des talibans à Kaboul, un grand retour en arrière s'opère à coups d'interdictions, notamment par cette loi sur la prévention du vice. À la fin du mois d'août 2024, c'est elle, déjà, qui prévoyait de faire taire toute parole de femmes dans l'espace public, avec une interdiction de chanter ou de lire à haute voix. En trois ans, ce sont plus de 70 décrets qui ont privé les femmes de liberté, selon le conseil européen. Le régime se flatte par ailleurs de 13 000 arrestations sur la seule année 2023 pour "actes immoraux". Une plongée dans l'obscurité que la communauté internationale semble observer impuissante, occupée à plus urgent, et s'accommodant assez cyniquement d'une stabilité nouvelle de la région, où les attentats et le trafic ont perdu en intensité. À quel prix ? Celui de libertés consumées, dans un pays où les voix s'éteignent et les visages s'effacent sous le joug des fondamentalistes, alors que plus du tiers de la population afghane souffre de graves difficultés alimentaires.
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