Ados et internet : les "digital native" existent-ils ?
Il fut une époque où les adultes s'extasiaient à la vue d'un bambin manipulant un téléphone (filaire). Les mêmes, avec quelques années de plus, n'en reviennent pas de voir aujourd'hui les enfants des bambins en question surfer sur le web avec aisance et élégance. Les jeunes d'une vingtaine d'années, et ceux qui les suivent, n'ont pas connu d'autre monde que celui de la toile, qui s'est étendue de façon exponentielle depuis le milieu des années 90.
Ils sont ceux que l'écrivain, consultant et intellectuel américain Marc Prensky a appelés Digital natives : ceux qui sont nés dans un monde digital, caractérisés par une culture du partage, une définition plus souple de la vie privée, une attitude de "zappeurs". Nés après 1994, ils sont censés avoir grandi dans un univers de nouvelles technologies et en être devenus des experts par une sorte d'osmose sociale. "Ils ont une aisance que moi je n'ai pas ", admet Amélie, une mère de famille marseillaise, qui a trois enfants de 14 à 6 ans.
92% des 15-17 ans sur Facebook
De fait, Facebook devient le premier lieu de sociabilité, à partir du moment où ils peuvent y accéder. Ainsi, 92% des 15-17 ans ont un profil sur le réseau social, selon une enquête menée l'an dernier. Ils sont 80% pour les 13-15 ans, et 64% pour les 11-13 ans. La plupart d'entre eux (36%) y passe entre une et deux heures par jour, 11% y surfent plus de deux heures : "On n'utilise plus le téléphone", reconnaît Théo, le fils aîné d'Amélie. "Pour les gens qui sont moins proches, on passe par Facebook ". Seuls les meilleurs amis restent des piliers du téléphone, de plus en plus souvent un smartphone.
Mais si les enfants impressionnent leurs parents quand ils surfent sur le web (mais les enfants n'impressionnent-ils pas toujours les parents pour quelque chose ?), les sociologues se montrent plus sceptiques. Le concept de digital native et ceux qui l'ont suivi, les générations dites C ou Y, ont du plomb dans l'aile.
En cause, la formation dispensée en informatique depuis les années 80. Elle s'est trop attachée à former des utilisateurs, et non des producteurs. "Je les considère comme mineurs face à la technique ", explique le sociologue Olivier Le Deuff, de l'université Bordeaux 3. "Ils ont une connaissance simpliste, voire magique de la technique, ça fonctionne par bouton-poussoir. Et du coup, ils ne s'interrogent pas sur tous les processus complexes qu'il y a derrière, qui leurs sont dissimulés. Et très vite, on peut retomber dans des formes de manipulation. On ne forme pas les futurs citoyens. l'ambition a été d'emblée trop faible ".
Eviter les manipulations
Pour lui, un des moyens d'en sortir est de pousser les adolescents à produire du contenu construit sur internet, sous forme de blogs par exemple, afin de mieux en appréhender les mécanismes.
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