Anne Fraysse, graphiste indépendante : "Les intelligences artificielles sont à la fois terriblement intéressantes et dangereuses"

Tout l'été, on interroge des salariés, des indépendants, des chefs d'entreprise sur leur rapport aux intelligences artificielles génératives. Comment les utilisent-ils, comment modifient-elles leur pratique professionnelle ?Aujourd'hui, Anne Fraysse, graphiste free-lance à Lyon.
Article rédigé par Sarah Lemoine
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3 min
Le cerveau humain peut faire appel à l'IA générative pour trouver la bonne idée de graphisme ou de design. (STELLALEVI / DIGITAL VISION VECTORS / GETTY IMAGES)

Dans le graphisme, Anne Fraysse, s'est spécialisée dans le design de marque. C'est-à-dire qu'elle conçoit l'identité visuelle d'une entreprise, ce qui permet aux clients de la reconnaître en un coup d'œil. Les intelligences artificielles génératives, elle dit s'y être intéressée, avec l'arrivée de services comme Midjourney et Dall-E, capables de générer des images.

Une utilisation régulière

"En tant que designer, notre métier évolue en fonction des outils, toujours de manière assez spectaculaire. J'ai 51 ans, quand j'ai commencé à travailler, on faisait des maquettes avec des photocopies, on n'imprimait pas en couleur. Ce qui a changé notre travail, ce fut Internet. C'est pareil avec les intelligences artificielles : elles vont changer fondamentalement notre pratique".

Après avoir testé les IA génératives pendant un an, Anne Fraysse les utilise régulièrement depuis quelques mois.

"L'Intelligence artificielle me permet de créer facilement des images paradoxales et d'explorer des idées de façon très libre. Par exemple, lorsque j'ai travaillé sur l'identité visuelle d'une agence de communication, j'ai donné à Midjourney une image d'un tableau renaissance et je lui ai demandé d'ajouter des produits de haute technologie, un iPad et un casque. Midjourney a généré une image avec un style graphique de gravure renaissance, assez étonnante, assez perturbante et donc intéressante. Cela m'aurait pris des journées pour le faire."

L'intelligence artificielle générative est un gain de temps et une aide à la créativité. C'est comme cela que j'ai envie de l'envisager.

Anne Fraysse, graphiste designer

à franceinfo

La crainte de perdre des clients

Aujourd'hui, la graphiste définit ces IA génératives comme "terriblement intéressantes et dangereuses" à la fois. Elle pointe un risque d'uniformisation de la création, si toute la profession se met à les utiliser. Mais ce qu'elle craint avant tout, c'est de perdre des clients. 

"Il existe des plateformes qui permettent de générer des logotypes qui sont, pour le moment, assez mauvais mais qui satisfont déjà un certain nombre de personnes. Il est fort possible que d'ici 4 à 5 ans, des plateformes plus performantes émergent et qu'elles soient à même de réaliser des identités visuelles tout à fait correctes pour 90% de mes clients. Cela m'inquiète".

La graphiste soulève aussi la question des droits d'auteur et la rémunération des graphistes dont le travail sert à alimenter et à entraîner ces IA génératives.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.