Consultation sans prescription de médicaments : la France à la traîne
D'après une récente étude, en France, consultation chez le médecin et prescription de médicaments sont trop fréquemment associés. Pourtant il existe d'autres solutions moins pourvoyeuses d’effets secondaires et moins coûteuses. Explication avec le docteur Martin Ducret, médecin et journaliste au Quotidien du Médecin.
franceinfo : Que révèle cette étude française ?
Martin Ducret : Que trop de médicaments sont prescrits en France. Dans notre pays, plus de 80% des consultations chez le médecin donnent lieu à une prescription de médicaments. Au Royaume-Uni, c’est seulement la moitié, et en Suède on tombe à 30% ! Nous faisons clairement figure de mauvais élève européen. Et quand on sait que les effets indésirables des médicaments entraînent chaque année 130 000 hospitalisations et 10 000 décès, il est impératif de modifier nos habitudes
Quelles sont les causes de ce retard français ?
Elles sont multiples. D’abord du point de vue des patients, c’est principalement par besoin d’efficacité, par habitude, par absence de temps pour se tourner vers une autre thérapie. Ou tout simplement parce que le médecin leur prescrit un médicament, ils se sentent obligé d’en consommer. Ensuite pour les médecins, c’est majoritairement par manque de temps en consultation, par réflexe, par difficulté à dire non aux patients ou encore par influence des laboratoires, qu’ils prescrivent par excès des médicaments.
Constatez-vous une influence des laboratoires dans votre pratique ?
Personnellement, je reçois de temps en temps des visiteurs médicaux, représentant des laboratoires, mais certains de mes confrères ne le font pas. Ces visites sont dans les faits uniquement à visée informative, pourtant les études sur le sujet montrent qu’elles influencent indirectement le médecin dans ses prescriptions.
Consacrer du temps pour échanger avec le patient vous semble-t-il essentiel pour prescrire moins de médicaments ?
Oui. Je constate que plus j’ai du temps en consultation, plus je peux comprendre de quoi souffre un patient et plus j’aurai à dispositions différentes solutions à lui proposer. Pas seulement des médicaments. Par exemple, si un patient souffre d’anxiété ou de trouble du sommeil, il sera plus efficace de l’écouter, de lui délivrer des conseils sur son hygiène de vie (mieux s’alimenter, faire du sport, etc..) et l’orienter vers un spécialiste, plutôt que de lui prescrire des anxiolytiques ou des somnifères. Dans la même logique, un patient qui se plaint d’un mal dos quotidien sans gravité sera bien mieux soulagé par des séances de rééducation que par la prise d’antidouleur.
Peut-on envisager d'autres mesures ?
Cette prise en compte du temps est primordiale, mais oui d’autres mesures sont nécessaires pour rattraper notre retard. Il faut améliorer les recommandations de prescription pour les médecins, davantage de campagnes de santé publique pour éduquer les patients ou encore une meilleure valorisation des thérapies non médicamenteuses, comme le sport-santé par exemple.
Lire ICI l'étude (en anglais)
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.