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Ukraine : refuser l'impuissance, et combattre

Refuser l'impuissance, c'est sûrement le point commun entre ces civils ukrainiens qui prennent les armes pour défendre leur pays, pour ces étrangers aussi qui s'enrolent dans l'armée ukrainienne, dans des légions étrangères. 

Article rédigé par franceinfo, Claude Halmos
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
17 mars 2022. Après un couvre-feu de 35 heures, des habitants de Kiev courent pour chercher un abri après une explosion, alors que les troupes russes cherchent à encercler la capitale ukrainienne dans le cadre de leur lente offensive.  (FADEL SENNA / AFP)

Des Ukrainiens quittent leurs études, leur travail, leurs familles, et même le pays où ils se trouvaient, pour rejoindre les combats. D’autres, qui ne sont pas ukrainiens, les rejoignent sur place ou organisent, partout en Europe, la solidarité avec eux. décryptage de cette résistance et de cette solidarité avec la psychanalyste Claude Halmos. 

france info : Comment expliquer un tel élan de solidarité ?

Claude Halmos : Les Ukrainiens sont confrontés à une volonté de destruction terrifiante. Et cette destruction ne se limite pas à bombarder le maximum de bâtiments, et à tuer le maximum de gens, ce qui est déjà terrible. Il s’agit de le faire avec le maximum de cruauté, et au mépris de toutes les lois, pour signifier aux Ukrainiens que l’on peut les écraser, comme s’ils n’étaient rien ; et surtout pour le signifier au reste du monde.

Les cadavres de civils, abattus délibérément, sur les routes, sont là pour prouver au monde la toute-puissance de Vladimir Poutine. Et il y a, en Ukraine, mais aussi partout en Europe, la conscience d’une dimension, dans cette guerre : "massacre pour démontrer son pouvoir".

Cette conscience explique la mobilisation ?

Elle nous remplit d’horreur et de révolte mais elle n’entraîne une mobilisation que parce qu’elle s’accompagne, chez les Européens, d’une possibilité de s’identifier aux Ukrainiens. C’est-à-dire de penser que ce qui leur arrive pourrait leur arriver aussi, à eux. Et, à partir de là, de ne plus considérer les réfugiés comme un danger, mais comme des alter ego qu’il faut aider, comme on voudrait l’être soi-même, en pareil cas.

Et c’est évidemment très différent de ce qui s’est passé par rapport aux réfugiés non-européens (syriens, par exemple), qui ont pourtant vécu la même destruction.
La différence s’explique sans doute par la proximité de l’Ukraine, par la menace nucléaire, brandie par Poutine, qui n’épargnerait personne ; par les positions fermes prises par l’Europe, qui donnent une direction.

Et bien sûr, par le fait que les tenants de la haine de l’étranger sont, en France, momentanément discrédités par leur soutien à Poutine. Et cette mobilisation est très importante, psychologiquement, pour les Français.

Pour quelle raison ?

La destruction, que l’on pourrait dire psychique, à laquelle se livre Vladimir Poutine, en signifiant aux Ukrainiens qu’ils ne sont rien (et que l’on retrouve d’ailleurs, dans toutes les destructions de masse, et les génocides : ceux des nazis, des Khmers rouges...) est terrible pour eux. Et elle explique que beaucoup abandonnent tout pour partir au front, et affirmer, au prix de leur vie, leur dignité, que le leader russe veut nier.

Mais elle est terrible aussi pour les Européens qui y assistent. Parce que voir niée, par une force toute puissante, l’humanité d’êtres humains est un facteur de désespérance, de dépression.

Organiser la solidarité est donc une façon de résister à cette désespérance, et de sortir de l’impuissance et de la solitude – elles aussi très destructrices – en rejoignant les autres, pour faire exister avec eux un monde qui redevienne, parce que l’on y respecte des valeurs humaines, psychologiquement vivable.

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